Majorité-Opposition : Tous les coups sont-ils permis ?

Opposition au parlement maroc

Entre le chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane et l’opposition, le torchon brûle. En fait, l’incendie s’est ravivé avec l’arrivée sur le devant de la scène de Hamid Chabat (PI) et Driss Lachgar (USFP).

Sommes-nous au bord d’une crise politique, à l’approche des échéances électorales régionales et communales? En tout cas, les signes avant-coureurs le prédisent et le bras de fer entre la majorité et l’opposition l’atteste. On en veut pour preuve la séance de l’oral du chef de gouvernement (mardi 29 avril 2015) sur la politique générale, qui a tourné au vinaigre et contraint le président de la Chambre des représentants à lever la séance, faute de climat et de conditions propices pour la continuer.

Prêt à quitter le navire

«Nous ne serrons jamais les dents, concernant les portefeuilles ministériels. Et si ce gouvernement arrive à perdre le soutien officiel et populaire, je suis prêt à quitter le navire», a dit Abdelilah Benkirane lors d’une réunion du Secrétariat général du PJD.

Le chef de gouvernement a ainsi lancé un message verbal, répondant à ses détracteurs, ceux qui cherchent, a-t-il dit, «à me museler par tous les moyens au point d’en référer à SM le Roi».
Ces sorties médiatiques, nous a confié une source proche du gouvernement, «visent en fait à déjouer les manœuvres de ceux qui ont orchestré et continuent une campagne de dénigrement à double objectif: d’une part, tout faire pour bloquer les institutions et, d’autre part, pousser le chef de gouvernement vers la sortie».

«Je ne me tairai jamais!»

La réponse du berger à la bergère ne s’est pas fait attendre. Elle est venue claire, nette et directe. «Je ne me tairai jamais!», a lancé Abdelilah Benkirane lors du meeting (à Casablanca), à l’occasion du 1er Mai, de la centrale syndicale du PJD, l’UNT (Union Nationale du Travail). Et de reprendre ce qu’il a déjà dit lors de sa dernière prise de parole à la Chambre des représentants, après avoir étalé, chiffres à l’appui, le bilan positif de son gouvernement, en particulier en ce qui concernait le volet endettement. C’est un gouvernement de la «Baraka» et toutes manœuvres visant à le désarçonner seront vouées à l’échec. Ce qui ne l’a pas empêché, lui, réputé pour son franc-parler, de dire –et ce n’était pas pour la première fois- qu’il était prêt à mourir «fi sabili Allah», tout en ajoutant: «Et si on me demande de partir, je partirai»; avant de se raviser, pour donner un coup de massue à ses adversaires potentiels (en les qualifiant de front de la corruption): «Je promets de ne pas laisser la porte grande ouverte à une bande dont l’un de ses acolytes est le symbole même de la corruption et de la tyrannie…», référence à peine voilée à Driss Lachgar qui ne l’avait pas ménagé lors de la séance de l’oral sur la politique générale. Laquelle séance avait été suspendue par le président de la Chambre des représentants, Rachid Talbi Alami. Un autre adversaire, l’istiqlalien Hamid Chabat (qui était absent à cette séance), n’a pas été épargné, ni d’ailleurs le PAMiste Ilias El Omari.
Benkirane s’est ensuite tourné directement vers les citoyens, leur demandant de l’aider à affronter ses adversaires, avouant qu’il n’arriverait jamais seul à le faire, malgré les décisions graves qu’il a été obligé de prendre. «Aidez-moi à tenir tête aux mafiosi».

L’USFP déjoue les intrigues du Polisario

Accusations inacceptables

Selon une source proche du PJD, Abdelilah Benkirane arrive difficilement à avaler «les sottes et inacceptables accusations de l’istiqlalien Hamid Chabat sur de prétendues relations avec Daech, Annosra et le Mossad israélien». En fait, ce qui le dérange encore plus, expliquent ses proches, c’est le silence radio de la sphère officielle qui n’a pas bougé le petit doigt, ni proféré un traître mot pour le soutenir, passant sous silence cette campagne de dénigrement qu’il dit bien orchestrée, à laquelle se mêlent certains médias pour prêter main forte à ceux qui ne ménagent aucun effort pour le désarçonner; lui qui aurait dû être «salué» pour ses positions salvatrices qui ont favorisé la stabilité du pays, à un moment où les pays de la région et d’autres de par le monde sont tombés ou ont basculé dans l’instabilité et les crises politico-sociales.

Bataille sur tous les fronts

L’opposition n’a ménagé aucun effort et utilise tous les moyens, même en se plaignant auprès de SM le Roi Mohammed VI, sous prétexte de solliciter l’arbitrage royal dans un différend qui, en fait, oppose majorité et opposition. Elle a aussi profité de ce qu’elle a qualifié de «scandale», à savoir la relation entre deux ministres du PJD, El Habib Choubani et Soumaya Benkhaldoun, ainsi que l’affaire du ministre Abdelkader Amara qui a installé une chambre à coucher et une douche dans son bureau, pour attaquer frontalement le chef de gouvernement et l’affaiblir, l’obligeant à batailler sur tous les fronts. Ce qui a poussé un député PJD à lancer cette boutade qui n’est peut-être pas sans fondement: «Benkirane, farrane ou qade b’houma», c’est-à-dire que Benkirane peut les affronter tous.

L’opposition peine à resserrer ses rangs

Ces attaques en batailles rangées ne donnent pas à l’opposition le dessus sur Benkirane, les citoyens ne voyant pas d’un bon œil le fait que cette dernière transforme l’Hémicycle en arène ou en cirque et que toutes ses attaques ne visent que la personne du chef de gouvernement; alors que son action gagnerait plutôt à être focalisée sur les vrais problèmes qui touchent les citoyens.
C’est à croire que l’opposition peine à resserrer ses rangs pour mettre sur pied un programme consistant, clair et contraignant pour le gouvernement. C’est cela la vraie bataille, si l’opposition veut que l’on compte à son actif d’avoir consacré et rehaussé l’expérience démocratique, loin de toute politique politicienne et de tout combat de coqs pour des portefeuilles au gouvernement.

Convaincre le citoyen

Il faut cependant reconnaître que l’opposition, dans sa mouture actuelle, n’a pas encore compris que c’est le citoyen qui doit rester au centre de ses préoccupations et que c’est lui qu’il s’agit de convaincre, parce que c’est lui en fin de compte qui décide par son vote ou son abstention. L’image que donne aujourd’hui l’opposition d’elle-même est peu convaincante et, partant, loin d’être mobilisatrice. En effet, le citoyen en a ras-le-bol -même si la presse s’y abreuve- de voir l’opposition réduire toute son action à critiquer Benkirane, au lieu de critiquer son bilan et de proposer des solutions alternatives. Le chef de gouvernement n’avait-il pas lancé cette boutade: «Si l’opposition continue comme ça, nous gagnerons les élections haut la main, même en dormant»?

Mohammed Nafaa

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Noureddine Modyane, chef du groupe istiqlalien à la Chambre des représentants

Maroc-Algérie Non aux va-t-en guerre !

Modiane istiqlal

«L’opposition n’a fait que se défendre»

Comment jugez-vous le bras de fer majorité-opposition, lors de la séance consacrée à la politique du gouvernement?

On aurait dit que la réaction du chef de gouvernement était prévue d’avance et qu’il a dit ce qu’il avait à dire pour provoquer justement une levée de séance…

Le chef de gouvernement a critiqué les contradictions de l’opposition vis-à-vis des décisions du gouvernement…

Nous n’étions pas encore arrivés, lors de cette séance, à la question qui a pu provoquer ce lever de bouclier, à savoir le thème du dialogue social. L’opposition s’est adressée au Cabinet royal, pour une médiation royale et pour faire la part des choses.

Ne voyez-vous pas que les Marocains aspirent à une relation majorité-opposition d’une qualité meilleure?

Les Marocains et l’opinion publique nationale sont certes dégoûtés et nous aussi. Il n’est pas normal que les séances parlementaires se transforment en véritable cirque. Il faut mettre fin à ces pratiques qui n’honorent personne et que la majorité, l’opposition et le gouvernement assument leurs responsabilités. Il faut mettre fin à cette pagaille.

SM Le Roi a appelé les parlementaires à rehausser le niveau de l’action parlementaire.

Personnellement, je ne suis pas près de venir à l’Hémicycle pour assister à des bras de fer et à tout ce chahut.

Est-ce aussi le lot des séances des questions orales?

Ajoutez à cela les réunions des commissions. Nous nous concertons au sein de l’opposition pour boycotter les séances des questions orales.

La majorité vous reproche de chercher à bloquer les institutions et même à pousser le chef de gouvernement vers la sortie. Qu’en dites-vous?

La majorité peut dire ce qu’elle veut, l’opposition n’a fait que se défendre. Vous voulez peut être que nous soyons agressés verbalement et que nous nous abstenions de nous défendre ?

Vous avez tenu une réunion avec le président de la Chambre des représentants, Rachid Talbi Alami. De quoi a-t-il été question?

M. Talbi nous a reçus en tant qu’opposition. Nous lui avons rappelé que nous n’étions pas prêts à travailler dans de telles conditions.

Propos recueillis par M. Nafaa

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Flashs

Benkirane recommande à ses ministres de répondre aux accusations

Abdelilah Benkirane ne cache pas qu’il a été profondément touché par les accusations portées contre lui (par Hamid Chabat, sans le nommer) d’adhérer à Daech, à Annosra et au Mossad, sans que la classe politique et officielle ne réagisse à ces accusations. Et, tout en pointant du doigt les erreurs que ses ministres auraient commises, il a critiqué sévèrement la campagne de dénigrement dont ces derniers font l’objet, allusion faite à la relation entre Habib Choubani et Soumaya Benkhaldoun. Par conséquent, il a recommandé à ses ministres de répondre aux éventuelles accusations dont ils pourraient faire l’objet.
A la réunion du Secrétariat général du PJD, Abdelilah Benkirane s’est dit prêt à se retirer en cas d’absence de soutien populaire ou officiel.

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Hami Eddine: le PJD n’est pas un parti islamiste

Abdelali Hami Eddine, professeur de sciences politiques et membre du secrétariat général du Parti de la Justice et du Développement, a appelé à ne plus qualifier ce parti d’islamiste, parce qu’il est dorénavant ouvert à tous les Marocains.
Le PJD, en fait, a précisé Hami Eddine, est un parti politique à référentiel islamique et non pas un parti religieux.

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