Banque Centrale | Pourquoi “la planche à billet” n’est-elle pas envisageable ?

Banque Centrale |  Pourquoi “la planche à billet” n’est-elle pas envisageable ?

Le débat sur le financement de la dette publique par la Banque centrale, ou ce qu’on appelle péjorativement “faire fonctionner la planche à billet”, a refait surface avec la crise actuelle et les soutiens financiers importants déployés par les États pour amortir ses répercussions immédiates.

Suivant ce schéma, la Banque centrale se met à acheter directement ou indirectement, sur le marché secondaire ou par l’intermédiation d’autres agents économiques, des titres publics émis par le Trésor. Est-ce que le Maroc peut-il alors se permettre une telle pratique ? et à quel prix cela pourrait se faire ? Approché par la MAP, l’économiste Yasser Tamsamani porte un éclairage sur les avantages et risques de cette politique.
Au Maroc comme ailleurs, le financement monétaire de la dette peut présenter des avantages :

– C’est une réponse, d’une part rapide à des besoins de financement urgents à cause de la crise alors que toute réforme fiscale nécessite du temps, et d’autre part efficace au moment où “la préférence pour la liquidité” des agents privés se développe au fur et à mesure que l’horizon économique s’assombrit;

– Il permet une maîtrise du coût de l’endettement avec une possibilité de le transformer en dette perpétuelle et gratuite, ce qui dessert la contrainte de soutenabilité de la dette du Trésor;

– Il incite indirectement les banques à s’engager davantage dans le financement de l’économie dès lors qu’une partie des choix qui s’offrent à elles pour le placement de leurs fonds leur échappe ;

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– Il exerce une pression à la baisse sur les taux d’intérêt à cause d’une moindre demande de liquidité sur le marché comparativement à une situation où l’État s’y refinance;

Le financement monétaire de la dette publique porteur d’un potentiel risque de crise de change et d’inflation:

A y regarder de plus près, le financement monétaire de la dette publique au Maroc ne s’avère pas une bonne idée.

– Il semble porteur d’un potentiel risque de crise de change. Ajoutons à cela un autre risque d’inflation voire d’inflation cumulative, bien que ce ne soit pas très probable dans le contexte actuel.

– Etant libérée de toute contrainte de soutenabilité (c’est-à-dire de devoir et de pouvoir rembourser sa dette), la hausse de la dette publique pour financer des dépenses supplémentaires, permettre une baisse des impôts ou pour faire face à une quelconque crise, deviendrait la solution la plus facile à mettre en place, et donc récurrente, pour les raisons/ avantages cités plus haut, mais aussi car elle se ferait sans aucun sacrifice de la part d’aucun agent économique en particulier.

– Pour une élasticité inchangée des importations aux dépenses publiques, le recours répété à ce financement devrait finir par épuiser les réserves en devises dont disposent les autorités en vue de faire respecter la parité du dirham et jeter le pays dans une crise de change.

– En outre, dans ce cas de figure, la politique monétaire sera affrontée au dilemme créé par la volonté de viser deux objectifs avec un seul instrument. Les deux objectifs sont le financement du Trésor et la défense de la valeur extérieure de la monnaie nationale.

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– Recourir au financement monétaire dans un régime de change fixe (ou intermédiaire tel que pratiqué au Maroc) revient à faire courir à l’économie un risque de crise de change pour une production nationale inchangée.

– Le deuxième risque inhérent au financement monétaire récurrent et sans contrôle de l’usage fait de la dette publique est relatif à la dynamique des prix. Si l’inflation par les coûts de production n’est pas envisageable dans les conditions actuelles de l’économie nationale, celle qui naît du creusement de l’écart entre l’offre et la demande rendant compte de la rareté des biens et services n’est pas à écarter dans le cas où la dette servirait à financer les dépenses de fonctionnement ou la consommation finale.

– De même, le risque d’inflation voire d’inflation cumulative peut provenir d’une situation où la confiance dans la monnaie nationale serait ébranlée à cause d’une expansion de l’argent facile au sein de l’économie causant une perte de sa valeur.
Pour toutes ces raisons et en absence des garde-fous requis, cette porte du financement monétaire devrait rester fermée dans le cas du Maroc. Car une fois enfoncée, les chances d’y recourir trop fréquemment sont très élevées.

LR/MAP

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