Crise avec l’Espagne | Les surprises du Maroc

Dans la crise du Maroc avec l’Espagne, Rabat a surpris par l’efficacité de ses services de renseignement, par l’efficacité de sa Diplomatie et par bien d’autres aspects inattendus, voire insoupçonnés, de sa gestion de cette crise.

Une crise qui -cela aussi est une surprise- n’empêche pas le Maroc de poursuivre ses autres activités diplomatiques. Notamment sa nouvelle campagne pour un mandat de membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations unies (pour les deux années 2028-2029).

Ainsi que la réalisation de ses autres objectifs nationaux.

Celui de se doter d’un nouveau modèle de développement a fait l’actualité de cette semaine… Comme un pied de nez à ceux qui, exploitant les récentes images de l’afflux des enfants à Ceuta, se sont étalés sur les carences de certaines catégories sociales du Maroc et autre points faibles…

La crise qu’a provoquée l’Espagne avec le Maroc en passant un deal avec le Pouvoir algérien pour accueillir le chef des séparatistes du Polisario, Brahim Ghali, sous la fausse identité de Mohamed Benbattouche, dans le dos du «partenaire stratégique» marocain, a eu son lot de révélations.

Le comportement et les calculs du Gouvernement Sanchez et, notamment, de la cheffe de la diplomatie espagnole, Arancha Gonzales Laya, en ont stupéfait plus d’un.

Des voix, de l’intérieur-même de l’Espagne, se sont élevées pour exprimer leur sidération devant l’inconscience avec laquelle ont été si peu ménagées les relations entre Madrid et Rabat, patiemment construites des années durant.

Chaque détail de cette crise, révélé par la suite, a levé un peu plus le voile sur ses véritables instigateurs et leurs réelles intentions.

Une crise pleine de surprises…

Des surprises, le Maroc en a asséné plusieurs. Et il en réserve encore quelques-unes, si besoin, comme annoncé par l’ambassadeur directeur général des affaires politiques au ministère des Affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Fouad Yazourh, qui rappelle que «les services marocains sont parmi les plus performants».

«Bad deal» et «arrogance eurocentrique»

Ce sont en effet les services de renseignement marocains qui ont révélé au grand jour l’entrée illégale de Brahim Ghali en Espagne, où il est poursuivi par la Justice, sous une fausse identité et avec de faux papiers algériens. Un deal, négocié en toute connaissance de cause par l’Espagne et l’Algérie, que ces deux Etats pensaient pouvoir garder secret (deal qui se voulait bien secret et non «discret», comme le prétend Arancha Gonzales Laya).

Ces révélations étaient la 1ère surprise créée par le Maroc… Le premier choc pour la Diplomatie espagnole, qui espérait que cette duplicité passerait inaperçue.

De plus, quand la forfaiture a été éventée, la cheffe de la Diplomatie espagnole, qui l’a justifiée par «des raisons humanitaires», continuait de soutenir que cela n’affecterait pas les relations avec le Maroc.

Le choc a donc été encore plus grand face à la fermeté qu’a opposée le Maroc à ce «Bad deal» reçu comme un coup de traître.

Cette fermeté, dont la Diplomatie marocaine n’a eu de cesse d’expliquer les raisons, n’a pas surpris Pedro Sanchez et Arancha Gonzales Laya seulement.

Tous ceux qui, dans leur «arrogance eurocentrique», selon une expression du directeur du quotidien espagnol «La Razon», Francisco Marhuenda, ont analysé et analysent encore les positions du Maroc à travers leur tropisme colonial, n’en reviennent pas.

Ces commentateurs, qu’ils soient espagnols ou autre européens, en étaient presque à ordonner au Maroc de se plier à leurs desideratas !

Notamment quand le Maroc a décidé de rappeler à ceux qui semblaient l’avoir oublié, le rôle qu’il assume dans la lutte contre l’immigration illégale, en n’exerçant plus de contrôle aux frontières de Ceuta.

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Tous sont tombés à bras raccourcis sur le Maroc, s’emparant de ces images de dizaines d’enfants qui ont afflué vers le Préside, à pied ou à la nage, pour fustiger le Royaume.

Le «d’une pierre 3 coups » de l’Espagne 

Le Gouvernement Sanchez, lui, en a profité pour faire d’une pierre 3 coups.

D’abord, détourner l’attention du problème initial qu’est l’entrée illégale du tortionnaire Brahim Ghali en Espagne, en mettant en avant deux nouveaux problèmes: celui de l’immigration et celui des présides Ceuta et Melilla.

Ensuite, par ce subterfuge, jouer une carte de politique intérieure, en mobilisant son opinion autour de questions nationalistes. Ce qui lui permettrait à la fois de damer le pion à ses rivaux sur ces questions, notamment l’extrême Droite qu’incarne Santiago Abascal et son parti «Vox» ; et de renforcer exécutif et camp socialistes, mis à mal par une Droite qui gagne de plus en plus de terrain (cf les récentes élections régionales à Madrid qui ont conduit à la déconfiture des socialistes et de leur allié Podemos, s’accompagnant de la démission du chef de ce parti, Pedro Iglesias).

Enfin, se saisir des questions d’immigration et des Présides était un moyen inespéré de transformer la crise de l’Espagne avec le Maroc en crise du Maroc avec l’Europe, en misant sur une solidarité européenne qui renforcerait l’Espagne.

Répondant au coup par coup, le Maroc a encore surpris en ne se laissant ni impressionner par la mobilisation qu’essayait d’obtenir l’Espagne ni, surtout, détourner de l’origine de la crise qu’il ne cessait de pointer et de rappeler: le GhaliG²²ate.

Ceuta, Melilla et le Détroit de Gibraltar…

La surenchère de Ceuta et Melilla n’a pas fonctionné. Le Maroc officiel n’y a pas réagi. Si dans les réseaux sociaux et dans la presse, des voix indépendantes ont rappelé que Ceuta et Melilla étaient des Présides occupés, le silence de la Diplomatie marocaine sur cette question signifie que la position du Maroc n’a pas changé. Une position connue. Le Maroc revendique les Présides Ceuta et Melilla comme l’Espagne revendique Gibraltar. Feu SM Hassan II avait proposé de confier le problème à une cellule de réflexion et avait subtilement ajouté que le jour où l’Espagne récupérerait Gibraltar, elle libèrerait forcément Ceuta et Melilla, sachant que la communauté internationale n’accepterait jamais qu’un seul Etat prenne en tenailles le Détroit de Gibraltar. Depuis, une seule conviction a prévalu côté marocain: la solution est dans le dialogue et… La qualité du partenariat !

Concernant la question de l’immigration, la suspension du contrôle aux portes de Ceuta, pendant deux ou trois jours, n’était pas une véritable déclaration de guerre du Maroc. Ce n’était qu’un petit rappel d’un des aspects importants du partenariat maroco-espagnol et de la mission assurée quotidiennement par les autorités marocaines au service de l’Espagne. Un message subliminal.

S’il avait réellement voulu ouvrir les hostilités, le Maroc, qui est le pays de transit par excellence de tous les migrants d’Afrique –notamment subsaharienne- aurait laissé les voies libres à qui veut accéder à l’Espagne, pour y rester ou pour aller plus loin en Europe… Et pas seulement pendant 3 ou 4 jours.

Nasser Bourita, le Maroc et l’Europe

Cependant, bien qu’une certaine presse se soit «jetée» sur la malheureuse séquence des gamins de Fnideq rejoignant Ceuta par la mer, pour diaboliser le Maroc, la Diplomatie marocaine ne s’est pas démontée ni démobilisée pour autant.

Le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, qui était déjà sur tous les fronts, en a ouvert d’autres en direction de l’Europe et de ceux parmi ses responsables qui se sont empressés de se positionner au nom de l’Europe, dans une crise qui ne concerne que l’Espagne (tels: le vice-président de la Commission européenne, Margaritis Schinas ; le Haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell : ou encore, la commissaire suédoise aux affaires intérieures de l’UE, Ylva Johansson).

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Courtoisement mais sans langue de bois, Nasser Bourita a remis les pendules à l’heure.

A l’Europe en général, il a précisé, martelé, que «le Maroc n’a pas de problèmes avec l’Europe, ni avec le partenariat qui le lie à l’Europe. Le Maroc a un problème avec l’Espagne».

Et à ceux de ses responsables qui se sont laissés aller à des réflexions désobligeantes visant le Maroc –voire qui lui ont adressé des injonctions- le ministre des Affaires étrangères a vertement rappelé que «le Maroc n’a pas vocation à être le gendarme de l’Europe, ni le concierge de l’Europe». Et que les responsabilités qu’il assume dans la lutte contre l’immigration clandestine, il les assume, non pas pour la contrepartie financière que certains mettent perfidement en avant –les moyens que le Maroc consacre à cette lutte sont plus importants que ceux qu’il reçoit- mais dans le cadre d’un partenariat dans l’intérêt de tous.

Et puis, ces surprises-là…

Alors que l’Algérie, principal acteur de cette crise –mais à laquelle le Maroc ne s’adresse pas, habitué à sa haine d’un demi-siècle et aux intentions maléfiques qui l’animent- fait claironner par sa presse que le Maroc n’a jamais connu un tel isolement… La Diplomatie marocaine crée une autre surprise.

La crise avec l’Espagne n’empêche pas le Maroc de mener au pas de charge une campagne pour un mandat de membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, pour les deux années 2028-2029.

Nasser Bourita tient des visioconférences quotidiennes avec les pays amis, membres de l’Assemblée Générale, laquelle Assemblée est habilitée à voter.  (Nous y reviendrons).

La crise n’empêche pas non plus le Royaume de poursuivre la réalisation de ses objectifs nationaux.

C’est ainsi qu’une dernière surprise a fait l’actualité cette semaine… La présentation au Roi du Rapport sur le nouveau modèle de développement dont le Maroc veut se doter. C’est un projet auquel le Maroc réfléchit depuis fin 2018, date à laquelle le Roi a lancé l’idée et mis en place une Commission pour y travailler. Le Rapport devait être présenté en juin 2020, n’était-ce la crise sanitaire Covid-19. Un an plus tard, dans l’élan de la relance post Covid, ce grand projet entre dans la phase du concret. Projet sur lequel se fondent de gros espoirs.    

Quant à l’Algérie…

  Comment finira la crise maroco-espagnole ? Jusqu’où iront le Gouvernement Sanchez et sa ministre des Affaires étrangères, apparemment acquise aux thèses algériennes sur le Sahara ?

Une chose est sûre, l’Espagne sait très bien la sensibilité du dossier du Sahara pour le Maroc. Sinon, elle n’aurait pas participé secrètement à la mascarade frauduleuse de l’affaire Benbattouche.

Elle sait aussi qui mène réellement la guerre du Sahara contre le Maroc. Ce n’est pas le Polisario qui n’est qu’un pantin.

Ce n’est pas l’Algérie civile qui n’a aucun pouvoir en réalité.

C’est tout simplement l’armée algérienne.

Quelle autre preuve plus évidente que le simple fait que ce soit 4 généraux algériens qui aient conduit l’affaire «Brahim Ghali Benbattouche» ? Et que ce soit encore des Généraux qui se soient déplacés en Espagne lundi dernier pour les suites de cette affaire ?

Bref, quelle preuve autre que ce soit l’Armée qui négocie, gère et se pose en interlocuteur de l’Espagne…?

Bahia Amrani

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