L’adultère a détruit notre vie

Yassine, 30 ans, commerçant, est marié et père de 2 enfants. L’adultère a décimé la vie de son père et de sa mère. Voici son récit.

«De l’adultère,  on ne se sort jamais indemne. Et pour cause, aujourd’hui, je suis le fils d’un meurtrier qui croupit en prison.

Les désordres dans la vie de mon père avaient débuté, alors qu’il était cadre dans une entreprise de renom sur la place. Sa situation sociale était très enviable. Mais il avait commis l’erreur la plus stupide qui soit, celle d’avoir une liaison extraconjugale avec la responsable administrative. Conscient de la gravité de leurs agissements et craignant qu’un scandale ne vienne nuire à son job, ainsi qu’à son union légitime, il avait tenté d’y mettre fin impitoyablement. La femme, blessée d’avoir été plaquée de la sorte, avait donc tout mis en œuvre pour que mon père dégage, une main devant, une main derrière… Elle avait tout manigancé pour qu’il soit évincé, en allant jusqu’à falsifier de nombreux documents. Il s’est donc retrouvé  au chômage et ce, durant plus d’une année. 

Cette période a été cauchemardesque pour nous tous. Mon père voyait filer ses maigres économies jusqu’à ne plus être en mesure de garantir ce qu’il y a de plus élémentaire à son foyer. C’est dans cet affolement qu’il prit la décision de vendre son seul bien: notre appartement. Il nous installa dans une location provisoire. Aussi et illico, il acheta, aménagea et approvisionna un magasin. Il mit tout au nom de ma mère pour libérer sa conscience et surtout pour éviter qu’il soit tenté de la tromper une autre fois. Peu à peu, il commençait à voir le bout du tunnel grâce à une clientèle de plus en plus fidèle. Il travaillait sans relâche, ne s’accordant ni horaires souples, ni jour de congé. Au bout de quelques années, il put nous sortir de cette horrible habitation et nous offrir la sérénité.  Encore une fois, c’est à ma mère qu’il léguait ce bien, les remords de son adultère n’avaient jamais cessé de le hanter. Il ne savait pas qu’il commettait la plus grosse erreur de sa vie.

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Il le sut trois mois plus tard. Alors qu’il démarrait sa journée de travail, son frère qu’il n’avait pas revu depuis leur dernière altercation fit irruption dans son local. Il le supplia de fermer boutique et de l’accompagner.  Mal à l’aise, mon père lui laissa tout de même une chance de se faire pardonner pour la dernière brouille. Il le suivit donc pour s’attabler dans un café. Sans aller par quatre chemins, mon oncle lui révéla d’un bloc que ma mère ne lui était pas fidèle et ce, depuis longtemps. Elle le trompait avec un cousin éloigné au vu et au su de toute la famille. Personne jusque-là n’avait osé l’en informer à cause de sa prétendue fragilité psychologique liée à son licenciement et tout ce qu’il endurait pour se reconstruire. Croyant au canular, une colère noire s’empara de mon père. Mon oncle l’abandonna en affirmant qu’il ne supportait pas l’idée de le savoir si aveugle au point de concéder tous ses biens à une traîtresse. Sans chercher à vérifier discrètement la véracité de cette information, mon pauvre père s’est empressé d’aller confier à ma mère ce qu’il venait d’apprendre. Bien évidemment, il n’avait jamais douté d’elle, pas même après ces «calomnies». Elle pleura, lui avouant que sa belle famille ne l’avait jamais aimée et qu’il en serait ainsi jusqu’à la fin des temps. Elle fit mine d’être extrêmement affligée, brisée, puis lui demanda que le mieux pour le moment serait qu’elle s’en aille passer quelques jours auprès de sa mère. Rassuré, il l’y autorisa tout en qualifiant son frère d’imposteur, de semeur de troubles. Il dit même qu’il regrettait de ne pas lui avoir assené une inoubliable correction. Hélas, mon père se trompait lourdement! Ma chère mère -puisse le Tout-Puissant lui pardonner-, deux jours après son départ, lui faisait parvenir par voie de justice une demande de divorce. Il comprit alors un peu tard que durant des années, il avait été berné et qu’il allait tout perdre: son honneur, ses biens et le respect de ses enfants.

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C’est ce qui le conduisit à commettre l’irréparable: il avait vraiment perdu la raison. Aujourd’hui encore, mon père ne se souvient plus du tout de comment il s’y était pris pour retrouver ma mère. Tout ce qui lui reste en mémoire, ce sont ses mains qu’il serrait autour de son cou. Il l’avait étranglée jusqu’à ce que mort s’ensuive. Il a ensuite fui pour aller se terrer dans notre maison. Très vite, il avait été retrouvé, puis incarcéré. Nous n’avons pas échappé au scandale qui s’en est suivi, tout le monde a su que c’est l’adultère qui a tué ma mère. Quant à mon père, il a tout perdu et, pire aujourd’hui, c’est un assassin. Depuis, mes sœurs et moi essayons tout de même de lui apporter un soutien moral en lui rendant visite tout le temps. Les propos qu’il continue de nous tenir nous tourmentent énormément. Il me promet de nous venger et que l’amant de notre mère ne s’en sortira pas indemne. Nous essayons du mieux que nous pouvons de lui expliquer que ce qui nous apaiserait vraiment, c’est l’oubli, l’oubli de tout ».

Mariem Bennani

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