Mon réveillon à moi, cette année…

Soufiane, 33 ans, notre invité entrepreneur de l’an dernier, que nous avions reçu dans ce même espace, à la même période, aujourd’hui père d’un enfant, se confie à nouveau. Non, il ne vient pas nous dire la même chose… 

«Vous vous souvenez de l’an dernier à la même période ? J’étais venu vous parler de fêter le jour du réveillon à la maison malgré la pandémie de Covid 19. Je vous racontais alors ce que j’avais enduré le jour des courses. Surtout, ne vous en faites pas, je ne reviens pas pour vous annoncer mon divorce, ou que les fêtes de fin d’année, c’est fini pour moi. Il en est hors de question et aujourd’hui plus que jamais! En effet, je compte bien, en pyjama, me trémousser joyeusement à minuit avec ma femme et mon fils qui n’a que trois mois. Eh oui, je suis désormais papa et incroyablement heureux. En revanche, ce que j’espère par-dessus tout, c’est d’avoir un peu plus confiance en l’avenir parce que l’ambiance générale, à cause de ce virus, fait peur. Ce n’est pas comme si je n’entendais pas gronder l’immense colère de beaucoup sur le pass sanitaire, sur la probable 5ème vaccination, sur la crise actuelle et le devenir de leur entreprise, sur l’écroulement de leur situation personnelle et familiale depuis leur chômage… Ou de ceux qui attendaient impatiemment le retour, pour les vacances, de leurs enfants étudiants à l’étranger, de ceux qui avaient des plans pour recevoir ou rendre visite à leur famille vivant à l’étranger pour fêter le nouvel an… Et j’espère également que ma belle-mère, qui balance des idées incongrues, s’éclipse au moins du 31 décembre jusqu’à l’an prochain. Dites-moi que oui, que je peux espérer, je vous en supplie!  J’ai tellement besoin d’être rassuré sur le fait que nous tous nous irons bien. 

Alors, cette année, je pense ne rien vous apprendre des news de la Covid 19, qui nous a pondu son petit criminel Deltavirus et maintenant elle nous exhibe sous la menace encore une fois, son foutu dernier Omicron. Rien à dire, la Covid 19 et ma femme sont très fortes. Allons donc, ce n’est que de l’humour! Il n’y a rien de comparable entre les deux! Dame Covid 19 la tueuse, elle et sa diabolique progéniture ne rendent personne heureux. Tout le monde ne rêve que de les enterrer vivants, et qu’on n’en parle plus jamais. Ces trois-là, ils ont réussi à mettre la planète sens dessus-dessous! Quelle sale histoire! Si seulement, il avait été possible à temps de lui ligaturer les trompes à celle-là, nous aurions été sauvés aujourd’hui.  Quant à ma chère et tendre, c’est un très beau cadeau de la vie qu’elle m’a offert. Un petit bout de mec à moi qui me rend dingue d’amour.

Il y a quand même quelque chose de très important que je dois vous avouer à ce sujet. Figurez-vous que l’individu qui vous parle n’avait pas été fichu de singer «Timothy» faisant virevolter dans les airs «Abby» sa bien-aimée quand elle lui annonce qu’elle attend un enfant. Pas la peine de vous creuser les méninges pour essayer de situer dans quel film ça se passe. J’ai volontairement choisi des prénoms au hasard qui reviennent souvent mais qui riment. Ce genre de scène, foisonne dans les films à l’eau de rose américains et en particulier dans ceux sur le thème de la magie de Noël. Demandez à votre femme et vous verrez.  Bref, une fois mis au parfum, une trouille d’un genre nouveau m’avait vraiment momifié. M’étaient tombées dessus comme la foudre, en ce temps de crise, de flou généré par la pandémie, de vaccins, toutes les raisons du monde de ne pas sauter de joie. 

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Mais aussi la plus imposante, à savoir mon antipathie avérée pour les bambins qu’ils soient il, elle, ou iel. Vous savez, les mioches et moi, nous n’avons jamais été de grands potes.  Cela à cause du passé. Précisément, quand mon petit frère et ma petite sœur étaient nés. Des faux jumeaux qui avaient été parachutés dans notre famille, me volant la vedette et pas seulement… J’étais déjà adolescent, me croyant rester fils unique pour toujours.  Ces deux-là, que j’aimais à petites doses et que j’aime toujours, avaient gâché mon existence et détruit mon petit monde. Sans parler du comportement de mes parents qui s’étaient acharnés à me forcer à la camaraderie et à l’assistance pour le bien des deux frelons. Je haïssais de toutes mes cellules le fait de m’improviser en nounou, en chaperon et en gendarme, quand tous les jeunes de mon âge ne s’occupaient que d’eux-mêmes en toute liberté. Et me risquer à la rébellion ne me rapportait que d’insupportables critiques ou de cuisantes taloches. Je ne rêvais plus pour ainsi dire, que de ce jour où je ficherais le camp de cette maison où ma chambre, mes affaires et ma propre personne, ne m’appartenaient plus. Vous comprendrez pourquoi je ne pouvais plus sentir ce qui s’appelait bébé ou gamin.

Mais, la vie… La vie à deux, je ne l’avais pas vue venir, tout comme mon gamin aujourd’hui. Cette surprise, lovée dans mes bras, une fois que j’en avais accusé réception pour de vrai, je ne saurai vous décrire l’emprise de l’émotion.  Des larmes de libération avaient coulé. Et dire qu’il ne m’avait suffi que de cet instant de magie pour remettre certaines de mes pendules à l’heure et me glisser dans la peau de quelqu’un d’autre. Je me sentais métamorphosé en un invincible et gigantesque papa, prêt à combattre l’univers, juste pour cette minuscule virgule faite de ma chair et de mon sang. Envolés, mon indifférence à la cause enfantine, ou mes plannings de passe-temps favoris, ainsi que toutes mes élucubrations sur les pathétiques couples avec enfants!

Je peux vous dire que je me fiche complètement de me savoir encore à réveillonner à la maison cette année. D’ailleurs, les budgets, fête de fin d’année, baptême et vacances, ont d’ores et déjà été consacrés à l’aménagement de la chambre de bébé, à sa sécurité dans la maison et à son bien-être. Je n’ai pas oublié d’acheter la poussette, le siège auto, le chauffage, le matériel électrique pour stériliser les biberons ou faire des purées, et un tas d’autres babioles, toutes aussi indispensables les unes que les autres. J’ai même été jusqu’à changer de machine à laver le linge et d’aspirateur. Comme un gamin, j’avais adoré m’occuper de tout cela. Le summum du divertissement avait été d’étoffer la garde-robe de mon petit monsieur et de choisir des jouets pour ses distractions. 

Mais à peine avais-je eu le temps de savourer tout cela que ma belle-mère était venue me casser l’ambiance, en ravivant une plaie… Quand même, elle n’avait pas pu se la boucler pour une fois!? Bien sûr qu’elle est encore là, soit disant pour prêter main forte à sa fille dans sa nouvelle mission. Maintenant, je passe mon temps à l’éviter tout en priant le Seigneur que son mari nous débarrasse d’elle. C’est à se demander s’il ne se complait pas de son absence… Oh que oui pardi, je ne supporterais pas que la nouvelle année démarre avec la vision de sa tronche et de ce qui en sort. Une vraie calamité ! A cause d’elle, mon bon moral a fondu comme neige au soleil. Je lui en veux terriblement.

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Que s’est-il passé ?

Dernièrement, pour justifier que sa présence n’est pas inutile pendant que je m’essayais à changer le petit, elle s’était mise à tournoyer dans la chambre comme un derviche pour ranger le désordre. C’est alors qu’elle m’avait attaqué avec une de ses très mauvaises idées, aussi imbuvable que stupide. Direct, je ne l’encadrais plus. Elle avait commencé par me dire que nous avions tellement de chance, nous, les parents de cette époque. Parce que nous avions si facilement et à portée de main tout ce dont nous avions besoin pour accompagner sereinement chaque pas de nos petits amours. 

A ses dires, beaucoup de ce que j’avais acheté pour mon fils était quasi-introuvable sur le marché national, il y a si peu d’années en arrière. Seules une ou deux enseignes, sans oublier la pharmacie proposaient quelques articles vitaux de puériculture. Pareil pour les vêtements, les peluches ou jouets éducatifs, etc. Toujours selon elle, il n’y avait pas autant de choix de marchandise locale ou d’importation et ce, pour quelque bourse que ce soit. Elle se souvenait, disait-elle, que très souvent, l’impérieuse nécessité d’une simple petite doudoune ou de bottines imperméables, par exemple, l’obligeait à se ravitailler dans la «joutia», le marché de fripes et autres articles d’occasion de provenance étrangère. Pendant qu’elle parlait, elle s’extasiait sur la beauté de chaque objet ou vêtement qu’elle remettait en place. 

Et puis, je ne sais ce qui lui a pris d’enchainer en disant que ce serait dommage quand même que tout cet argent dépensé parte en fumée. Notamment si nous ne l’amortissions pas vite en lui redonnant l’incommensurable joie d’être grand-mère une seconde fois. Que vous dire d’autre, sinon que c’était plus qu’abuser de ma patience que de finir en me jetant de surcroit un affreux clin d’œil!  Je n’en revenais pas qu’elle eut ce culot de me proposer une telle barbarie… Faire comme mes parents et imposer à ce petit être sans défense un frère ou une sœur, jamais de la vie! C’était mal me connaître! Là, la belle-doche, elle avait émoustillé mon caractère sanguin en appuyant très fort sur la plus mauvaise touche de tout mon système nerveux. Mais, bébé était là et ce n’était guère le moment de lui montrer de quel bois je me chauffais. Malheureux, j’avais rongé mon frein en lui rétorquant que ce genre de blague ne me faisait pas rire du tout. Je ne sais ce qu’elle avait continué à se raconter toute seule, puisque j’avais pris dare-dare la poudre d’escampette. 

Pour délivrer mon mental de ce supplice qui m’avait été infligé, je me suis mis à l’écart et commencé à dresser ma liste de courses pour le réveillon qui est à nos portes. Nul doute que je ne me suis pas permis la moindre extravagance, mais qu’importe, je ne regretterai pas de beaucoup miser sur une ambiance jardin d’enfant ou nurserie. L’essentiel pour moi est de marquer l’évènement. Et, cette fois-ci, tous les trois, bébé, ma femme et moi, à notre façon et surtout sans intrus !».   

Mariem Bennani

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