Règlement du conflit du Sahara : Les plans de John Bolton tombent à l’eau

Règlement du conflit du Sahara : Les plans de John Bolton tombent à l’eau

C’est par un simple tweet que Donald Trump a annoncé le 8 octobre 2019,  le limogeage de son conseiller à la sécurité nationale, John Bolton

Beaucoup de choses ont changé depuis avril 2018, date à laquelle a été votée la résolution 2448 sur le Sahara, renouvelant le mandat de la Minurso de six mois, imposée par un certain… John Bolton.

Depuis qu’il a été limogé de son poste d’ambassadeur des États-Unis aux Nations unies en 2006, John Bolton a toujours reproché au Maroc l’échec des efforts déployés par l’ONU pour mettre fin au conflit du Sahara. Il a également critiqué l’ONU pour ne pas avoir la volonté politique d’imposer une solution à ce dossier. Implicitement, Bolton voulait par tous les moyens, tordre le bras au Maroc en l’obligeant à accepter une solution qui sert les intérêts du Polisario et des pays qui leur apportent appui matériel, logistique et bien-entendu, financier. Dans ce cadre, Bolton a régulièrement insisté sur la nécessité de permettre aux Sahraouis d’exercer leur droit à l’«autodétermination par le biais d’un référendum».

Bolton voulait dicter ses conditions et imposer sa position

Une analyse des déclarations de Bolton sur le dossier du Sahara, suggère qu’il était aigri par son incapacité, ainsi que celle de son ex-patron, l’ancien émissaire onusien pour le Sahara, James Baker, à mettre fin au conflit. Il a donc profité de sa présence à la tête du Conseil de sécurité nationale, (National Security Council ou NSC), pour adapter l’issue du processus politique à ses convictions personnelles. La position de Bolton sur le conflit du Sahara s’écarte de la position officielle des administrations américaines, qui consiste à maintenir une position de neutralité positive, avec un soutien tacite à la position marocaine. 

L’intérêt de Bolton pour le dossier du Sahara était évident depuis le début de sa nomination comme conseiller à la sécurité nationale du président américain Donald Trump. Sa nomination à ce poste coïncidait avec la présentation par le Secrétaire général de l’ONU de son rapport annuel sur le Sahara en avril 2018 et avec les délibérations du Conseil de sécurité autour de la résolution annuelle sur le conflit. L’influence de Bolton s’est manifestée par l’adoption de la résolution 2414, qui renouvelait le mandat de la MINURSO pour une période de six mois seulement, par opposition à la traditionnelle période d’un an. Le raccourcissement du mandat de la MINURSO visait à faire pression sur le Maroc à se résoudre à parvenir à une solution, même non consensuelle, du conflit.

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Avant l’adoption de la résolution 2494 sur le Sahara, le 30 octobre 2019, par laquelle le mandat de la Minurso a été prorogé de douze mois au lieu de six, le Conseil de sécurité avait adopté trois précédentes résolutions (avril 2018-octobre 2018-avril 2019). Toutes avaient prolongé le mandat de la mission onusienne de six mois. Le raccourcissement du mandat de la Minurso et les pressions exercées par les États-Unis pour trouver une solution à la question du Sahara, ont ouvert la voie à la tenue de deux tables rondes à Genève en décembre 2018 et mars 2019 sous les auspices des Nations unies et de l’ancien émissaire onusien dans la région, Horst Köhler.

La détermination de John Bolton à imposer sa manière de faire, pro-séparatiste, était  manifeste dans son discours prononcé en décembre 2018 depuis l’«Heritage Foundation». Au cours de son allocution, celui qu’on surnommait le faucon de la Maison Blanche, avait exprimé sa frustration devant l’échec du Conseil de sécurité en matière de gestion du conflit, ainsi que l’échec de la Minurso dans sa mission de tenir un référendum d’autodétermination au Sahara. Il a également exprimé son engagement à mettre fin à ce qu’il considérait comme l’incapacité du Conseil de sécurité à trouver une solution définitive à ce dossier. Ce discours a été prononcé près d’un mois après la signature d’un contrat avec l’entreprise de lobbying Keene Consulting, propriété de l’ami proche de Bolton, David Keene. Ces deux événements suggèrent que Keene et Bolton travailleraient en collaboration pour façonner les résultats du processus politique des Nations Unies au profit de l’Algérie et du Polisario. Malgré l’influence de John  Bolton, il était évident qu’il ne pouvait prendre, à lui seul, aucune décision de politique étrangère, ni l’imposer à l’administration américaine. Le processus décisionnel américain comprenant de nombreux acteurs, notamment le département d’État, le département de la Défense et la Maison Blanche, qui a le dernier mot dans la prise de décision.

Malgré les obstacles, le Maroc sort gagnant

L’analyse des résultats du processus politique mené par l’ONU au Sahara au cours des 17 mois de mandat de John Bolton, montre qu’il a été plus positif pour le Maroc que beaucoup ne le croyaient. Le Maroc a fait preuve de sagesse et de résilience face à ce que les médias ont surnommé «l’effet Bolton».  

En effet et malgré la décision du Conseil de sécurité de raccourcir le mandat de la Minurso, les trois résolutions adoptées par le Conseil de sécurité en avril 2018, en octobre de la même année, et en avril 2019, ont permis au Maroc d’obtenir des résultats diplomatiques qu’il n’avait pas atteints avant cette période. Les résolutions 2414-2440-2468, ont illustré cette avancée diplomatique du Maroc, dans la mesure où elles ont insisté sur la nécessité de parvenir à une solution politique réaliste, réalisable et durable à la question du Sahara fondée sur le compromis et cela, avec toutes les parties, notamment l’Algérie, principale partie dans ce conflit, après le Maroc. Dans la mesure également où ces résolutions fixent désormais un cadre unique pour la recherche d’une solution: les tables rondes, sous l’égide de l’ONU, exclusivement.

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Sur la base de ce qui précède, il est clair que le Maroc est non seulement sorti gagnant du mandat de Bolton en tant que conseiller pour la sécurité nationale, il a également réalisé des gains diplomatiques importants. Une explication possible à cela est que le Maroc a bénéficié de l’intensification des contacts avec le Département d’Etat américain et du secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo. Les avancées diplomatiques que le Maroc a réalisées pendant le mandat de Bolton au sein de l’administration américaine, dans le cadre de la gestion et de la défense de la marocanité du Sahara, sous entendent, que le Royaume a bénéficié des relations houleuses et hostiles entre Bolton et le secrétaire d’État Mike Pompeo. Le Maroc a peut-être profité de ces circonstances pour empêcher Bolton d’imposer ses propres convictions et son agenda personnel, et c’est de bonne guerre.

Le Maroc a également réussi à faire passer son message à la Maison-Blanche en communiquant avec le gendre et conseiller principal du président Trump, Jared Kushner. Kushner a visité le Maroc en 2019, où il a été reçu par SM le Roi Mohammed VI. Cette visite montre que la diplomatie marocaine a réussi à faire passer son message au président Trump via son gendre, neutralisant ainsi Bolton et l’empêchant de saper les intérêts du Maroc ou d’affecter négativement les relations maroco-américaines, avec tout ce que cela aurait pu avoir comme conséquences…

Suite à l’adoption de la résolution 2494 sur le Sahara (30 octobre 2019), il apparait clair que le Conseil de sécurité est décidé à ouvrir une nouvelle perspective pour la gestion du dossier du Sahara, basée sur le réalisme et le compromis. Pour le Maroc, la proposition d’autonomie proposée par le Maroc en 2007, demeure l’unique solution réaliste pour la question du Sahara.

Mohcine Lourhzal

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