Comment je suis devenu cardiaque en pleine pandémie du Coronavirus

Lotfi, 37 ans, gérant de société, est marié et père de deux enfants. Cet homme espère, pour le rétablissement de son cœur, la fin rapide de la crise due à la pandémie du Coronavirus. Voici ce qu’il raconte.  

«En ce moment même, je suis en convalescence des suites d’une attaque cardiaque. Avoir failli perdre la vie, je le dois à la dégringolade de ma situation financière et dont on ne peut encore voir un arrêt. Mon médecin traitant m’a ordonné pour ne pas aggraver mon état, d’éviter la clope, l’alcool, le café, le thé, tout stress, toute forme de surmenage… Que c’est mignon ! Mais les choses ne sont pas si simples pour moi. De toutes les façons, j’ai bien eu l’impression qu’il n’avait pas besoin que je lui raconte comment j’en étais arrivé là. Il semblerait, selon son assistante avec qui j’avais discuté un peu, que je n’étais pas une exception, surtout depuis ce satané Coronavirus. La confirmation de ses aveux était assez facile au vu de ce nombre impressionnant de patients en salle d’attente. Et je ne vous parle pas de quand on peut obtenir un rendez-vous, on peut crever entre temps !  

Bref, peu importe, je l’ai choisi lui et pas un autre. Parque ce n’est pas un jeune apprenti à qui j’aurais servi de cobaye pour l’essai de toutes sortes de nouveaux médocs qui coûtent un bras (et dont on dit qu’ils sont inefficaces). Au contraire, celui-là jouit d’une solide réputation qui ne s’est pas forgée sur les réseaux sociaux. Vraiment, je me suis senti en confiance, c’est quelqu’un d’hyper consciencieux dans son travail. Par contre, et je suis sérieux, il est bien gentil le toubib et son traitement de moines tibétains, mais pour me remettre d’aplomb, il suffirait juste que le business reprenne. Sinon, en attendant, sans changement c’est sûr que je ne vais pas sortir vivant de cette histoire.  

Je vous jure que je regrette amèrement d’avoir entrainé ma femme dans cette aventure de déménagement. Nous aurions mieux fait de continuer à vivre dans la capitale en restant salariés. J’avais cru bon à notre âge de démarrer un business. Il était plus facile de nous installer en province parce que la vente de notre appartement dans la métropole économique nous avait permis d’en acquérir un autre plus spacieux et même d’acheter un grand magasin pour bosser à notre compte. Dans un premier temps, tout juste un an avant cette satanée pandémie nous nous étions félicités d’avoir osé le changement. D’autant que nous étions portés par un fougueux élan positif. Sans crainte, nous nous étions aussi endettés pour que notre projet voie le jour. C’est que dès notre démarrage, nous avions de bonnes commandes et tout portait à croire que finalement nous avions fait le bon choix. Sauf que depuis le premier confinement la machine s’était essoufflée, à tel point que nous n’arrivions plus à écouler ce qui pouvait payer au moins une de nos factures. Ben voilà, il suffit que j’en parle pour me faire dresser les cheveux sur la tête et amplifier mon rythme cardiaque. 

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Au début nous avions encore de l’espoir que les choses changent, mais au fur et à mesure que les jours passaient on sentait la pression nous étrangler. Il devenait de plus en plus difficile de proposer des nouveautés, surtout qu’il fallait devoir avant s’acquitter des arriérés. Dans la même foulée, nous nous sommes vus obligés de remercier nos recrues encore en période d’essai parce que leur présence n’était plus indispensable. C’était triste autant pour eux que pour nous. Ils ont été très compréhensifs parce qu’ils avaient bien vu que la situation était telle que nous nous trouvions dans l’incapacité de payer les mensualités de l’école de nos enfants. De ce côté, les relances avaient été plus virulentes que celles de nos fournisseurs.  

Pour régulariser au plus vite cette épouvantable déferlante de catastrophes, je me suis vu dans l’obligation de me séparer de ma voiture. Grâce à cette vente, j’ai plombé les menaces des détenteurs de chèques de caution. On ne m’y reprendra plus jamais, ces gens que l’on croit si arrangeants pour vous fourguer leur camelote sont capables de vous fiche en prison sans le moindre remord. Notre confortable train-train de vie, nous l’avions modifié en forçant sur les restrictions, vraiment la ceinture nous l’avons serrée. Et même en faisant cela, nous avons toujours cette impression de ne pas en faire assez. Heureusement que nos enfants sont encore petits et qu’ils ne se rendent pas vraiment compte de ce qui nous arrive. Il n’empêche que moi je souffre énormément d’avoir embarqué ma famille dans cette galère. Je ne suis pas du genre à m’apitoyer sur mon sort, mais me sentir bloqué sans rien pouvoir planifier, je n’arrive pas à le digérer et cela continue. Le payer au prix de ma santé en est la preuve… 

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Toute cette année, ce n’est pas la rate que je me suis mis au court-bouillon, mais le cœur. Être soutenu moralement par mon épouse n’a servi à rien. La pauvre n’a cessé de me réconforter en m’assurant que je ne devais pas me sentir responsable de ce qui nous arrive. Pour se justifier, elle me sort encore et toujours sa longue liste de personnes, elles aussi touchées de plein fouet par cette crise. En voyant que je ne démordais pas d’avoir la trouille que tombent des impayés de la banque et tout le chaos qu’ils peuvent engendrer, elle a été jusqu’à me proposer de retourner bosser, comme elle le faisait avant. Interdit d’y songer ai-je crié! Comment concevoir être aussi la cause d’un tel éparpillement dans notre petite famille? Pas question qu’en plus ce soit à elle de se taper 3 heures de train par jour pendant que je serai assis à voir voler les mouches dans notre magasin sans parler du sort de nos gamins. A force de broyer du noir nuit et jour, j’ai eu un malaise cardiaque qui m’a transporté direct à la clinique.  

Encore une fois, j’ai été responsable d’un trou dans notre budget qu’il a fallu colmater en vendant la voiture de ma femme. Nous pouvons tenir encore quelques temps, mais faudra quand même que rapidement ce foutu virus nous fiche la paix une bonne fois pour toutes. Sinon, gare aux trépas et tutti quanti pour cause d’un trop plein de surcharges émotionnelles émanant de problèmes financiers !». 

Mariem Bennani

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