Absence de pluie-Crise de l’Ukraine | Deux grosses menaces sur l’économie et la paix sociale

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L’année 2022 devait être celle d’une sortie de crise (pandémique), d’une reprise de l’économie mondiale et, au Maroc, du véritable coup d’envoi de la relance économique, ainsi que de la mise sur rails d’un nouveau modèle de développement.

Or, la vague Omicron qui a submergé le monde (Maroc compris), les tensions géopolitiques opposant la Russie aux Occidentaux (USA et Europe) autour de l’Ukraine, avec leurs répercussions géoéconomiques, en plus de l’absence de pluie qui ruine les espoirs de la campagne agricole de cette année, faussent tous les calculs du pays.

Faudra-t-il une Loi rectificative des Finances ?

Et quand bien même…

La chance n’est pas du côté du Gouvernement Akhannouch.

Ce n’est pourtant pas faute de s’être immédiatement attelé aux principaux objectifs que s’est fixé le pays, qui consistent à relancer l’économie, mettre en oeuvre le nouveau modèle de développement, entamer la généralisation de la couverture sociale, booster l’investissement, l’emploi, etc.

Le grand optimisme de l’Exécutif se nourrissait de son volontarisme… Et des signes de reprise de l’année précédente (2021) qui, hélas, ont été vite balayés par des facteurs autant internationaux que nationaux.

Il y a d’abord eu la reprise de l’économie mondiale qui –la demande ayant explosé- a exercé une pression sur les prix des hydrocarbures et, par conséquent, sur tous les produits et activités qui en dépendent.

Puis, la vague Omicron qui a renvoyé tous les Etats à la case «restrictions-confinements-fermetures des frontières». Et qui a donc ré-impacté des secteurs vitaux de l’économie, tel le tourisme.

Parallèlement, montaient les tensions sur le gaz, notamment en Europe, 1er partenaire commercial du Maroc. Tensions qui sont allées crescendo avec la crise de l’Ukraine, la Russie étant le principal fournisseur de gaz à l’Europe.

Or, le Maroc ne produit ni pétrole ni de gaz et, pour le reste, il importe plus qu’il n’exporte. Il a donc vu s’envoler les prix des hydrocarbures, matières 1ères et intrants importés, dont la répercussion sur les prix en interne est inévitable, malgré ce qu’amortit la Caisse de compensation…

Enfin, pour tout couronner, contrairement à l’année précédente où les pluies ont été d’une exceptionnelle abondance, donnant lieu à une tout aussi exceptionnelle campagne agricole et, notamment, céréalière (plus de 103 millions de quintaux !), 2022 donne tous les signes d’une année de sécheresse. Pour les spécialistes, la production céréalière est déjà compromise, en cette mi-février. Les importations de céréales seront donc plus importantes et payées au prix fort, creusant davantage les déficits commercial et budgétaire.

Mohamed El Mehdi Saidi, professeur de climatologie et hydrologie

Le gouvernement qui, dans la Loi de Finances 2022, a bâti ses prévisions budgétaires sur une campagne agricole de 80 millions de quintaux, sur un prix du baril de pétrole à 80 dollars et sur un cours moyen du gaz butane à 450 dollars la tonne, se retrouve avec une estimation céréalière pour 2022 ne dépassant pas les 30 millions de quintaux, avec un prix du baril qui court vers les 100 dollars et un cours du gaz qui n’a pas encore dit son dernier mot, compte tenu des incertitudes qui pèsent sur l’issue de la crise de l’Ukraine !

Quant à la dotation globale que la Loi de Finances 2022 prévoyait d’affecter à la compensation et qui est de 16 milliards de DH, elle a de fortes (mal) chances de faire voler en éclats ce plafond.

Aujourd’hui, aussi singulier que cela puisse paraître, le simple citoyen, au Maroc, a autant les yeux levés vers le ciel, guettant une pluie salvatrice, que l’oreille tendue vers l’Ukraine, guettant une sortie de crise définitive…

Tels sont les effets de la mondialisation. Une région du monde s’enrhume et tout le reste de la planète éternue !

Qui aurait pensé qu’en engageant un bras de fer avec l’OTAN et tous ses membres, quitte à menacer d’envahir l’Ukraine pour la garder dans son giron, le Président Poutine interviendrait dans la Loi de Finance 2022 du Maroc ?

Car, si une guerre éclate en Ukraine ou, même sans guerre, si le pourrissement de la situation est tel que les prix flambent à l’international, le Gouvernement Akhannouch sera amené à revoir ses prévisions budgétaires et les chiffres sur lesquels il les a bâties, en recourant à une Loi rectificative des Finances.

Cela ne changera rien, ni au déficit qui se creusera, ni à l’inflation qui grimpera. Mais le budget sera réajusté à la réalité de la situation nationale et internationale.

Et les nuages qui planent sur la paix sociale n’en seront pas dissipés pour autant.

En effet, ces prix qui flambent, tant au marché qu’à la pompe, conjugués à leur pouvoir d’achat, très affaibli par deux années de crise sanitaire, inquiète les citoyens dont la grogne commence à monter. La ménagère, les agriculteurs, les transporteurs… Tous sont frappés de plein fouet par l’inflation.

Musulmans, juifs et pluie au Maroc

Il n’est plus d’autre sujet que la hausse des prix. Que ce soit dans la rue, dans les chaumières, ou dans les espaces de commerce.
Le fait que l’Etat subventionne certains produits de 1ère nécessité n’y change rien. De plus, depuis la libéralisation du marché des hydrocarbures, fin 2015, les prix du carburant à la pompe font le yoyo, remuant régulièrement le couteau dans la plaie.

Les plus touchés commencent à donner de la voix, voire à prendre des initiatives… On l’a vu cette semaine avec la décision de l’Association Marocaine du Transport et de la Logistique (AMTL) qui a appelé, lundi 14 février 2022, ses affiliés à augmenter leurs tarifs de 20%, avant de se rétracter devant la réaction immédiate du Gouvernement.

Un Gouvernement qui se mobilise, mais qui aura bien du mal à répondre à toutes les sollicitations et attentes.

L’intervention du Roi l’y aidera cependant, au moins pour ce qui concerne le monde agricole et l’investissement (qui dit investissement, dit emploi et création de richesse).

SM Mohammed VI a en effet reçu, mercredi 16 février, le chef du Gouvernement Aziz Akhannouch et le ministre de l’agriculture, Mohamed Sadiki. Pour pallier le déficit pluviométrique, un programme exceptionnel est lancé. Le Souverain a décidé que le Fonds Hassan II pour le développement économique et social contribuera à ce programme, avec un montant de 3 milliards de dirhams, l’enveloppe financière globale étant estimée à 10 milliards de dirhams (Voire développements page 7).

Le même jour, le Souverain a présidé une séance de travail consacrée à la nouvelle charte de l’investissement. Au menu, les mesures d’incitation visant à inverser la tendance de l’investissement privé qui ne représente qu’un tiers de l’investissement total face à l’investissement public qui représente deux tiers, afin que ce soit l’investissement privé qui intervienne à hauteur des deux tiers d’ici à 2035.

Reste l’espoir que la pluviométrie soit plus clémente les prochaines semaines, pour sauver ce qui peut encore l’être ; que la Russie et les Occidentaux retirent leurs troupes des frontières de l’Ukraine afin que tout rentre dans l’ordre dans cette région ; que la pandémie passe définitivement sous contrôle ; et que le Gouvernement trouve des solutions qui calment les esprits.

Tout cela est à suivre dans les prochains jours, prochaines semaines…

Bahia Amrani

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