Enseignement Universitaire à Distance : Cinq questions au Président de l’Université Abdelmalek Essaâdi

Enseignement Universitaire à Distance : Cinq questions au Président de l’Université Abdelmalek Essaâdi

Le Président de l’Université Abdelmalek Essaâdi (UAE), Mohamed Rami, revient dans un entretien à la MAP sur l’expérience de l’enseignement universitaire à distance durant l’état d’urgence sanitaire, les perspectives de son adoption comme modèle pédagogique après la pandémie, ainsi que ses limites en termes d’évaluation des étudiants.

1- Comment se passe l’expérience de l’enseignement à distance à l’UAE après plus d’un mois de son adoption ?

L’enseignement à distance a été adopté en partant du principe de la nécessité de garantir la continuité de l’apprentissage pédagogique, et ce suite à l’arrêt des cours présentiels dans les établissements universitaires comme mesure préventive afin de lutter contre la propagation du nouveau coronavirus et préserver la santé des étudiants et des professeurs.

En effet, les professeurs et le staff administratif de l’UAE, que nous remercions, ont fait un travail énorme, produisant plus de 4.000 cours numériques que les étudiants peuvent consulter au niveau des plateformes ou les sites web des établissements universitaires. Ces cours sont également diffusés sur les chaînes télévisées et via les radios régionales d’Al Hoceima, Tétouan et Tanger. Plus de 140 cours ont été diffusés, jusque là, sur les ondes des radios régionales, tandis que d’autres cours ont été diffusés sur la chaîne de télévision Arrabia.

Un grand nombre de cours a également été téléchargé à partir des plateformes électroniques, qui sont en cours d’amélioration. Nous avons, par ailleurs, relevé une différence dans l’enseignement à distance entre les établissements à accès limité et ceux à accès ouvert. Pour les premiers où le nombre des étudiants est limité, les cours étaient généralement interactifs, tandis que pour les établissements à accès ouvert, il a fallu d’abord télécharger les cours des sites et plateformes des deux facultés, puis utiliser les autres plateformes électroniques pour diffuser les cours en direct.

S’agissant de la faculté de droit de Tétouan ou celle de Tanger, nous avons veillé à ce que les professeurs donnent leurs cours magistraux en ligne suivant le même emploi du temps des cours présentiels. Le professeur donne ainsi son cours alors que les étudiants suivent à distance et peuvent télécharger le cours par la suite pour le visionner à nouveau. Les facultés de droit de Tanger et Tétouan ont été prises comme exemple car 60.000 étudiants y sont inscrits, soit plus de 50% du nombre total des étudiants de l’Université Abdelmalek Essaâdi.

2- L’enseignement à distance pourrait-il devenir une réalité dans un avenir proche en associant cours présentiels et virtuels ?

Je pense que oui. Nous ne pouvons pas revenir à la situation que nous vivions avons la pandémie car la pédagogie de l’enseignement va changer et nous allons associer cours présentiels et renforcement des cours à distance.

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Je pense qu’il est nécessaire d’oeuvrer au niveau national pour créer une université virtuelle, surtout que nous disposons d’une quantité impressionnante de cours de différentes disciplines sur les plateformes numériques, qui pourraient constituer une base pour le lancement d’une université virtuelle avec ses propres professeurs et cadres administratifs. Cette université permettrait de prodiguer un enseignement à distance aux étudiants qui ne peuvent pas assister aux cours présentiels, et serait un énorme acquis pour le Maroc.

3- L’UAE dispose d’un Centre de créativité pédagogique. Comment ce centre a-t-il contribué au lancement de l’enseignement à distance ?

Le Centre de créativité pédagogique est un outil ayant accompagné la mise en place de l’enseignement à distance. L’idée de l’enseignement à distance avait été avancée il y’a quelque temps déjà, et des mesures avaient été prises dans ce sens avant la pandémie, mais sans suivi.

Actuellement, les ressources disponibles au niveau du centre ont été mobilisés, en plus de l’acquisition du matériel nécessaire pour aménager cinq autres centres de créativité pédagogique dans des établissements relevant de l’UAE à Larache, Tanger, Martil, Tétouan et Al Hoceima, afin de pouvoir enregistrer les cours. La présidence de l’Université veut continuer dans cette orientation et la développer davantage. Ces centres nécessitent la formation des professeurs, et donc la présence de formateurs, ce qui impose la coopération au niveau international et avec les universités marocaines, afin de garantir les cours et préparer un nouveau modèle pédagogique compatible avec ces changements, tout en permettant aux étudiants de suivre les cours, faire leurs exercices et réaliser leurs travaux pratiques à distance.

Il est à noter que nombre de professeurs ont réussi à enregistrer des travaux pratiques dans des matières scientifiques comme la physique et la biologie pour les mettre à la disposition des étudiants au niveau des plateformes.

4- L’UAE couvre un espace important, avec des écoles et universités à Tanger, Tétouan, Martil, Larache et Al Hoceima, en plus de projets d’établissements à Ouezzane et Chefchaouen. L’enseignement à distance permettrait-il d’améliorer l’offre pédagogique, notamment dans les facultés implantées en périphérie de la région ?

L’UAE est la seule université publique dans le nord du Royaume et couvre ainsi le territoire allant de Larache à Al Hoceima. Actuellement, elles compte 15 établissements, alors qu’un établissement est en cours de construction à Ksar El Kébir, en plus de projets d’écoles et de facultés à Ouezzane, Chefchaouen et Al Hoceima, ce qui veut dire que l’UAE comptera bientôt 20 établissements universitaires.

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La création de nouveaux établissements nécessite la mobilisation d’équipes pédagogiques et administratives, soit énormément de ressources humaines, et l’enseignement à distance peut nous aider dans ce sens. Un professeur pourrait donner son cours à Tétouan tout en étant suivi en direct par des étudiants à Chefchaouen ou Ouezzane via les outils de communication à distance.

Nous réfléchissons à un ensemble de mesures à prendre par l’Université à l’avenir pour instaurer l’enseignement à distance. Il s’agit notamment de doter l’ensemble des établissements universitaires de studios d’enregistrement et collaborer avec des spécialistes du domaine (radios, télévision et presse) puisque la diffusion et la communication ne relèvent pas des compétences de l’Université. Nous cherchons donc à renforcer nos compétences en ce domaine car donner des cours présentiels diffère des cours à distance.

L’Université est en cours d’acquisition du matériel nécessaire pour équiper l’ensemble de ses établissements de studios. Un centre, en cours d’aménagement au niveau de la présidence de l’Université, sera dédié au soutien et à l’accompagnement de l’ensemble des établissements relevant de l’UAE. Ce centre, qui est un “provider”, dispose déjà du matériel nécessaire pour stocker les cours à distance de toutes les facultés, avec la possibilité de suivre le taux de consultation et le nombre de téléchargement des cours.

En cette courte période, plus de 110.000 courriers électroniques institutionnels ont été émis au profit des étudiants pour leur permettre d’accéder à l’ensemble des plateformes numériques de l’Université, et ce grâce aux efforts consentis par les ingénieurs et les cadres des établissements relevant de l’UAE.

5- Pensez-vous que les universités atteindront, dans un avenir proche, l’étape de l’évaluation à distance ?

Je ne pense pas que ça puisse se faire dans un avenir proche car cette étape nécessite un certain nombre de conditions préalables. Nous nous sommes lancés actuellement dans l’opération de l’enseignement à distance, qui est différente de la formation à distance. Nous voulons atteindre la phase de formation des étudiants à distance, et ce n’est qu’à ce moment que nous pourrons réfléchir à instaurer un système d’évaluation à distance. Je ne pense pas que ce système sera mis en place à court ou moyen terme.

En attendant, nous pouvons proposer des exercices ou des examens blancs aux étudiants pour se familiariser avec les modalités de l’évaluation à distance. Le mois de mai sera dédié à la mise en oeuvre d’un ensemble de mesures dans ce sens, telles que la pratique des exercices et leur correction à distance, et ce afin de déterminer les outils possibles pour passer les examens à distance à l’avenir.

Avec MAP

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