Alors, on joue à se faire peur ?

L’éloge revient dans la bouche de tous les observateurs objectifs: le Maroc est le pays le plus stable de la région. Il revient tant et si bien que tous les superstitieux du pays commencent à craindre le mauvais œil. «Et si les jaloux nous portaient la poisse ? Si cette stabilité était ici ou là, pour une raison ou pour une autre, battue en brèche ?» s’angoissent-ils.
Le fait est que nous n’avons besoin de personne pour commencer à douter.

Il nous suffit de voir la légèreté avec laquelle le gouvernement traite les revendications à caractère social !
On ignore pourquoi, mais en la matière ce gouvernement donne l’impression d’être très sûr de lui. Le dialogue social est depuis longtemps rompu. Et quand un des ministres, voire le chef du gouvernement, prend la parole, c’est pour aligner les accusations, agiter des quasi-menaces, ou encore, traiter tout et tous par le mépris.
On voit bien qu’on n’est pas en période électorale…
Alors, qu’avons-nous aujourd’hui ?
Nous avons des syndicats (ils sont ce qu’ils sont, mais c’est un autre sujet) qui décident de descendre dans la rue. C’est le cas des trois centrales syndicales –l’Union marocaine du travail (UMT), la Fédération démocratique du travail (FDT) et la Confédération démocratique du travail (CDT)- qui ont annoncé une marche nationale, dimanche 6 avril, à Casablanca, pour obliger le gouvernement Benkirane à reprendre le dialogue social là où il a été rompu. Et en particulier, à accepter la négociation portant sur les accords passés par le gouvernement précédent, notamment, l’accord du 26 avril 2011 par lequel le gouvernement Abbas El Fassi, au beau milieu de la tourmente du «Printemps arabe», prenait plusieurs engagements dont une partie n’a toujours pas été mise en oeuvre.
De même que nous avons une fédération –celle des boulangers- qui, n’ayant trouvé aucun interlocuteur en mesure de désamorcer la crise, décrète une grève du pain, de deux jours (les 26 et 27 mars).
Certes, pour ce qui est des syndicats, on peut bien se dire qu’ils sont dans leur rôle «saisonnier». Les syndicats ont en effet le devoir, vis-à-vis de leur base et de l’opinion publique, de se manifester au moins deux fois par an. En mars-avril, en prévision du 1er mai (fête du travail et journée de grande parade syndicale) ; et en novembre-décembre, au moment du bouclage de la loi de Finances. Ce sont les deux dates où leurs revendications ont une chance d’être entendues. Il n’est donc pas étonnant que les trois syndicats aient choisi ce timing pour appeler à leur marche, dont l’élément nouveau –et non négligeable- est qu’elle est collective. Une marche de trois syndicats, ce n’est pas comme la marche d’un seul…
De même qu’en ce qui concerne la fédération des boulangers, on peut hausser les épaules, comme le fait le gouvernement, en minimisant les effets d’une pénurie de pain qui ne durerait que deux jours.
Mais il n’est jamais bon de traiter les questions sociales par le mépris. Sait-on à quoi peut conduire une grève ou une marche ?
Une partie de l’opinion s’est emparée de ces deux sujets, les liant et parlant même d’un «Printemps social», comme si l’on jouait à se faire peur…
Le gouvernement serait mieux inspiré de faire preuve de vigilance et, surtout, de faire ce que font tous les gouvernements responsables, face à des revendications, sociales ou autres: les traiter. Il a reçu mandat pour ça. Et cela vaut pour toute la durée de son mandat, pas seulement quand approchent les élections.
Jamais la stabilité n’a été aussi importante et en même temps aussi fragile, chez nous comme ailleurs dans le monde. Ce que l’on constate dans la région et au-delà le prouve et enseigne la prudence. Que le gouvernement cesse donc de jouer tantôt l’indifférence, tantôt le bras de fer. Cela s’appelle jouer avec le feu !

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Bahia Amrani

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