Syrie Une guerre d’Espagne arabo-musulmane?

L’histoire, c’est vrai, ne se répète pas, elle bafouille. Il y a cependant des comparaisons qui, parfois, s’imposent, d’autant plus qu’elles permettent de comprendre et d’anticiper.

Syrie

L’insurrection d’une large partie de la population syrienne contre le régime autoritaire du président Al-Assad, confisqué au profit d’un clan religieux, s’est depuis de longs mois transformée en une guerre civile. Il y a, d’un côté, l’armée régulière et, de l’autre, l’armée rebelle.

Depuis quelques mois, l’armée d’Al-Assad marque indiscutablement des points. Une reconquête lente mais indiscutable partie du réduit Alaouite, comme les franquistes étaient partis de territoires marocains puis du sud de l’Espagne. Une armée du régime qui regagne du terrain sur des rebelles divisés. Cette guerre ressemble à une sorte de conflit de répétition ou avant-coureur de ce qui apparaît de plus en plus comme une véritable guerre mondiale entre… arabes sunnites et arabes chiites.
Comme pour la guerre d’Espagne, chaque camp bénéficie d’aides étrangères. Les rebelles sunnites sont soutenus par le Qatar (entre autres pays arabes) et les grandes démocraties occidentales. Les républicains espagnols avaient, eux, l’aide de l’URSS et des démocraties occidentales fournissant des volontaires, témoigne le roman culte d’Hemingway «Pour qui sonne le glas».
Les franquistes étaient appuyés par les pays fascistes, l’Allemagne et l’Italie, dont la Légion Condor à l’origine d’une action aérienne -condamnée dans sa brutalité par Picasso dans son tableau Guernica- qui aura un retentissement mondial.
L’armée syrienne obtient, elle, l’appui de l’Iran et des chiites libanais. Ce qui déstabilise en ce moment l’armée syrienne libre, ce sont les combats internes entre «démocrates» et «islamistes». C’est un élément capital, car les républicains espagnols ont fait le jeu des nationalistes. Ils se sont déchirés, épurés même, entre staliniens et anarchistes, les premiers éliminant les seconds et affaiblissant de façon suicidaire leur propre camp.
C’est ce qui est en train de se produire en Syrie…
L’Armée Syrienne Libre (ASL) ne doit plus seulement faire face aux forces de Bachar. Elle est désormais confrontée à un nouvel ennemi: une nébuleuse terroriste islamiste qui se dit affiliée à Al-Qaïda, toujours à l’affût dans les pays en conflit où le pouvoir s’affaiblit (Irak, Afghanistan, Mali). Un groupe se réclamant d’Al-Qaïda envisagerait d’annoncer la mise en place d’un «État islamique» dans le nord de la Syrie.
«La nébuleuse terroriste Al-Qaïda envisage d’annoncer prochainement la création d’un  »État islamique » dans les régions du nord de la Syrie contrôlées par les djihadistes», assure l’ASL, citée par le quotidien panarabe Asharq Al-Awsat, en général bien informé. La mise en œuvre de ce plan aurait commencé la semaine dernière avec l’assassinat d’un commandant de l’ASL et de son frère dans le village de Dana, suivi de l’assassinat de Kamal Hamami membre du Conseil du commandement suprême, l’une des personnalités les plus en vue de l’ASL. «Il sera suivi par plus d’assassinats d’officiers et de personnages importants de l’ASL», affirme la source du journal. Devenue une véritable poudrière, les tensions et les heurts meurtriers se font de plus en plus fréquents entre la rébellion modérée soutenue par les Occidentaux et les groupes djihadistes tels le front Al Nosra et l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL). Le 17 juillet, l’Observatoire syrien des droits de l’homme rapportait de violents combats survenus entre des combattants kurdes syriens et des combattants du front Al Nosra, de l’EIIG et d’autres combattants extrémistes dans une localité frontalière de la Turquie.
Une montée en puissance des groupes islamistes fait craindre à certains des manœuvres sournoises de Bachar Al-Assad qui utiliserait des combattants étrangers pour diviser les combattants rebelles, mais laisse surtout de plus en plus perplexe sur l’opportunité des livraisons d’armes aux opposants syriens: «Armer l’ASL aujourd’hui, c’est armer Al-Qaïda», objectent certains observateurs. Il n’y a pas longtemps, les rebelles, postés à la périphérie de Damas, ciblaient la ville avec des obus de mortier, les soldats gouvernementaux faisaient défection en masse et des rapports faisaient état de nouveau territoire échappant à l’emprise du président Bachar Al-Assad. La situation s’est inversée.
Bien que peu s’attendent à ce que M. Al-Assad puisse rétablir son autorité sur l’ensemble de la Syrie, certains de ses plus farouches ennemis reconnaissent cependant que sa position est plus forte aujourd’hui qu’elle ne l’a été depuis des mois. Sa résistance suggère qu’il s’est taillé ce qui ressemble à un mini-État dans le centre de la Syrie (fermement soutenu par la Russie, l’Iran et le Hezbollah) et que lui et ses partisans vont probablement continuer à acculer les rebelles divisés.
Al-Assad peut-il gagner? Peut-il s’en sortir? C’est aujourd’hui plus vraisemblable, il faut en tenir compte, même et surtout si les grands médias occidentaux semblent vouloir occulter ces réalités de terrain qui sont des vérités qui dérangent, mais que l’on ne peut refuser si l’on veut vraiment aider le peuple syrien.

Syrie | Un banc d’essai

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Un commentaire

  1. Pas arabo-musulmane, mais occidentalo-émergente, même si le terrain se trouve au Proche Orient.
    Du reste la guerre d’Espagne se déroulait en Espagne mais préfigurait la guerre fasciste et anti-fasciste mondiale.
    A cette époque l’Allemagne essayait d’émerger de la crise économique par la guerre.

    Les « démocrates » aujourd’hui ne sont pas ceux qu’on croit, ce sont précisément les puissances occidentales qui sont sur le déclin, qui arment les groupes les plus réactionnaires pour déstabiliser les pays émergents, puis bombardent en désespoir de cause.
    Le drame de l’Irak et de la Libye ne se répétera pas impunément, la ficelle est une peu usée à présent.

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