Cette présidentielle française s’annonce comme historique. Il va y avoir une rupture avec le passé. Quelle rupture? On le saura dimanche 23 avril, avec les résultats du premier tour.
Pour le moment, on n’en sait rien. On n’en sait rien, car 4 candidats, selon les sondages mais pas seulement, conservent toutes leurs chances d’arriver parmi les deux premiers.
L’impact des sondages
Les sondages vont donc une nouvelle fois tenter de prouver qu’ils ne peuvent rien prévoir, mais qu’ils ont toujours raison. Il y a un problème. La sondocratie fausse, telle la démocratie élective? De plus en plus d’observateurs le pensent. Sans parler de manipulation volontaire pour avantager l’un ou l’autre, en fonction des propriétaires des organismes et de leur proximité avec les candidats, il y a bien un risque d’orienter les choix des électeurs. Les sondages ont annoncé pendant des mois un duel Macron-Le Pen. Ils ont annoncé la mort de Fillon, puis de Hamon, avant de devenir fascinés par Mélenchon.
Cette campagne a été commentée tous les jours en fonction de sondages qui, quelques jours avant le vote, affirment ne rien pouvoir prévoir.
Le rôle des réseaux sociaux
L’autre élément marquant, c’est le rôle des réseaux sociaux qui atténuent considérablement le poids de l’information télévisuelle. Et les sondages sont quasiment ignorés. C’est sans doute devenu plus important que les meetings qui font le plein, signe de l’internet de certains électeurs. Mais les meetings sont relayés sur les réseaux sociaux, les prolongent et les exploitent
Reste le résultat réel, le seul qui va compter, celui du premier tour.
Il y a une possibilité très forte de voir les partis qui se partagent le pouvoir en alternance depuis des décennies éliminés. C’est quasiment certain pour Hamon et le PS. C’est probable pour Fillon, quoique sa raideur dans la tempête lui ait donné une image de capitaine capable de tenir la barre. Il remonte lentement.
Macron, lui, l’homme le mieux traité par les médias, car jeune et nouveau, connaît des derniers jours plus difficiles. Il est tellement lisse qu’on a du mal à l’identifier clairement et que c’est difficile pour certains électeurs de voter pour le charme, sans comprendre le fond.
Marine Le Pen n’a pas élargi sa base électorale; elle a même dû, pour éviter un essoufflement notable, revenir aux thèmes forts du parti: l’immigration et l’islamisme. On la disait assurée d’être au second tour, ce n’est plus évident, même si certains affirment que son score est minoré par les instituts pour l’affaiblir.
Tant d’hypothèses !
Un second tour Mélenchon-Le Pen serait un affrontement entre le mondialisme européiste et le nationalisme populiste. Ce serait un vrai choix de société et d’avenir pour la France. Si Fillon est présent face à Macron, ce sera la solidité et l’expérience contre la nouveauté et le changement. S’il est face à Le Pen, ce sera le choc des droites dures, la traditionaliste contre la populiste.
Si c’est Mélenchon, ce sera une nouvelle gauche radicale, proposant un changement de république et la fin de la monarchie présidentielle à la française.
L’atout de Mélenchon c’est son talent de débatteur et de tribun de la plèbe. Sa faiblesse, c’est bien sûr un gauchisme parfois inquiétant. Le point faible de Marine Le Pen, c’est l’incertitude économique de la sortie de l’Europe et de l’Euro. Celle de Fillon, ce sont les affaires et l’image. Celle de Macron, c’est que le passe muraille est parfois un homme invisible.
Fillon devait gagner, puis Macron, puis Mélenchon, sans jamais écarter Marine Le Pen. Tout a été dit et le contraire aussi. Car, tout est possible.
Réponse, dimanche, après le silence pendant près de 48 heures des sondages. Enfin!
Ni le sondeur, ni le commentateur, mais l’électeur
Les électeurs vont décider, on l’espère en leur âme et conscience, car la démocratie, ce n’est pas le sondeur et le commentateur, c’est l’électeur. Heureusement.
Ceux qui ont tendance à l’oublier entre deux scrutins et croient toujours faire l’opinion -en plus, c’est leur gagne pain et leur justification-, malgré Trump, le Brexit et l’Autriche, pourraient une nouvelle fois être rattrapés par la réalité électorale, la seule qui compte.
Mais, une chose est sûre. L’intérêt suscité par ce vote français dans le monde montre bien que la plus incertaine des présidentielles est également la plus importante, depuis bien longtemps, pour la France, l’Europe et les équilibres mondiaux.
Une France divisée et, après les législatives, ingouvernable ajouterait de l’instabilité dans un monde de moins en moins sûr.
Où va la France? Premier élément de réponse, dimanche soir!
Patrice Zehr