Le pays otage de Chabat?

Il est tout à fait incompréhensible, voire inadmissible, que le chef d’un parti, qui fait partie de la coalition majoritaire au pouvoir, se lève ainsi un matin et décide de quitter le gouvernement! Il faut bien être Chabat pour le faire! Ceci n’honore cependant pas le n° 1 du Parti de l’Istiqlal (PI) qui est allé un peu loin dans ses ambitions…

chabat
Comme justification de cette décision de quitter le gouvernement, le PI, deuxième force à la Chambre des représentants avec 60 députés, a évoqué une incapacité du chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane, à prendre «en considération la gravité de la situation économique et sociale». Economique?

Puisque la situation est si inquiétante pour Chabat, pourquoi appelle-t-il donc au retrait de ses ministres, notamment celui de l’Economie et des Finances qui gère tant bien que mal une situation budgétaire déjà trop difficile? Un changement aussi brusque dans l’organisation de ce ministère demanderait plusieurs mois d’adaptation. Le remaniement paraît ainsi un risque à prendre, quelles qu’en soient les conséquences! Là, apparaît encore l’incohérence d’un acte mal «réfléchi» de ce chef de l’Istiqlal qui avance pourtant qu’il «adhère totalement à la volonté royale de garantir les conditions de stabilité et de servir les intérêts supérieurs de la nation». Drôle de notions de stabilité et d’observation des intérêts de la nation!
Il a fallu que le Roi intervienne, exhortant Chabat à ne pas quitter le gouvernement afin d’éviter une crise politique majeure. Du coup, «nous allons demander à nos ministres de gérer les affaires courantes dans l’attente du retour du Roi, qui se trouve actuellement en voyage privé à l’étranger», confirmera à cet effet Adil Benhamza, porte-parole de l’Istiqlal. Ce même parti, qui devra remettre au Roi un mémorandum, appelle à un arbitrage royal en application de l’article 42 de la constitution marocaine. L’article en question stipule que «le Roi, Chef de l’Etat, son Représentant suprême, Symbole de l’unité de la Nation, Garant de la pérennité et de la continuité de l’Etat et Arbitre suprême entre ses institutions, veille au respect de la Constitution, au bon fonctionnement des institutions constitutionnelles, à la protection du choix démocratique et des droits et libertés des citoyennes et des citoyens, et des collectivités, et au respect des engagements internationaux du Royaume». Arbitrage royal, oui, mais il ne s’agit nullement d’un conflit entre des institutions. C’est juste le patron de l’Istiqlal, se proclamant depuis toujours ennemi juré du chef de gouvernement et de son parti (PJD), qui fait encore des siennes. Une pseudo-crise au sein d’un gouvernement nécessite-t-elle une intervention royale? Le PJD dit cependant n’avoir reçu aucun document officiel faisant part de cette décision de l’Istiqlal et se garde donc de tout commentaire. Le parti de Chabat dit «maintenir sa position» sans pour autant agir, en attendant de voir ce qu’en décidera le Roi.
Chabat, ne comprenant pas toute la gravité de la situation, campe ainsi sur sa position et compte aller soit vers un remaniement, soit vers des élections législatives anticipées. Deux issues qui ne serviront pas du tout les intérêts du pays entré, depuis samedi 11 mai, dans un état d’attentisme dont la gravité n’est pesée par aucun des protagonistes qui ne comprennent apparemment rien au jeu politique, oubliant que c’est tout le pays qui est pris en otage et que tout est bloqué jusqu’à nouvel ordre. Entre-temps, ce sont les réactions, les hypothèses, les suppositions, les critiques et les propositions d’issue qui meublent ce vide. Ces réactions que Le Reporter capte et décrypte dans ce numéro. Dossier.

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