Loi de Finances Les Istiqlaliens fustigent

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Le projet de loi de Finances pour l’année 2014 n’a pas échappé aux feux des critiques de l’Alliance des économistes istiqlaliens pour qui ce projet «ignore les fondamentaux de tout diagnostic économique» à même d’identifier les vrais problèmes.

Le projet de loi de Finances (PLF) pour l’année 2014 a été la cible d’une pluie de critiques émanant de l’Alliance des économistes istiqlaliens. Ce projet «creux» s’est attiré les foudres de Adil Douiri, président de l’Alliance, qui a estimé que le gouvernement Benkirane est à court d’innovation et de vision économique claire. C’était à l’occasion d’une conférence de presse organisée par l’Alliance, jeudi 7 novembre 2013 à Casablanca.

Hypothèses «irréalistes»

L’analyse critique de Adil Douiri remet en question le cadre de référence et les orientations générales ayant présidé à l’élaboration dudit projet. A son avis, ce dernier a été conçu sur la base d’hypothèses «irréalistes», à commencer par le taux de croissance du PIB estimé à 4,2%. L’économiste en chef du parti de la balance pense que cet objectif est trop ambitieux au vu de la morosité du contexte économique mondial. Au vu du contexte national qu’il qualifie même de «dangereux», il prévoit pour sa part une croissance économique de 2,8% l’année prochaine. Cette configuration prévisionnelle est à attribuer à une progression plus ou moins significative du PIB non agricole de l’ordre de 4% et à un repli des activités agricoles de 3,8%, compte tenu d’une campagne agricole moyenne attendue. La perte de vitesse de la machine économique, ajoute-t-il, traduit en quelque sorte le contexte de «précipitation» dans lequel a été élaboré le projet de budget 2014. Émettant un jugement négatif sur la programmation des finances publiques, il prédit un creusement du déficit budgétaire pour s’élever à 6,3%, contrairement à l’objectif gouvernemental de ramener le déficit budgétaire à 4,9 % du PIB en 2014. Pour lui, l’aggravation des déséquilibres entre recettes et dépenses de l’Etat trouverait son fondement dans l’explosion des dépenses de compensation qui s’accroîtraient à 44 MMDH, au lieu des 35 MMDH prévues par le PLF 2014.

Attention au coût de la vie!

A moins que le gouvernement ne fasse répercuter directement la hausse des prix subventionnés sur le consommateur, c’est-à-dire continuer sur le processus de libéralisation progressive des prix des produits comme les carburants et peut-être le sucre, explique-t-il. Ce qui ne manquerait pas d’exercer des pressions à la hausse sur le coût de la vie. Anticipant d’ailleurs l’accentuation des tensions inflationnistes, mais sans avancer aucun indicateur chiffré à l’instar du gouvernement, Adil Douiri prévoit une détérioration continue du pouvoir d’achat des ménages. L’objectif de l’Exécutif, in fine, est de réussir la maîtrise du déficit budgétaire pour le contenir au-dessous du seuil de 6%, question de redorer son blason à l’égard du Fonds Monétaire International (FMI), commente le président de l’Alliance. Soulignant que la maîtrise du déficit se traduirait par des emprunts nouveaux que l’État doit contracter auprès des bailleurs de fonds internationaux, il prévoit ainsi des contraintes plus fortes et des déficits publics excessifs. Il pronostique que le ratio de la dette publique par rapport au PIB s’élèverait à 66%, au lieu de 54% lors de l’installation du gouvernement Benkirane.

Projet de loi de Finances 2014 Les agriculteurs insatisfaits

Mohamed Mounjid

Des mesures fiscales insuffisantes

Aux yeux de Douiri, les mesures fiscales proposées dans le projet de Finances sont loin de répondre aux vraies problématiques de compétitivité et de productivité du tissu entrepreneurial national. La fiscalité a besoin d’une «politique rationnelle» à même d’assurer l’élargissement de l’assiette fiscale et de mieux optimiser le rendement et les recettes du fisc sans pour autant accentuer la pression fiscale. Il met en garde contre le non-respect par le gouvernement de ses engagements en fermant les yeux sur bon nombre de propositions issues des dernières Assises nationales sur la fiscalité. Il en veut pour exemple, le retard des remboursements de crédit TVA par l’Etat, estimés à 17 MMDH. Le gouvernement avait promis alors de transférer ses dettes en créances titrisées que les entreprises pourraient céder sur le marché des capitaux, alimentant ainsi leur liquidité. Sur le chapitre de la multiplicité des taux de TVA, il explique que leurs harmonisation et uniformisation pour les porter à deux seulement (20 et 10%) risquent de nuire à la cohérence du système, mais surtout à la compétitivité des entreprises. Il met en garde encore une fois contre la prolifération des taxes parafiscales à l’exemple de l’écotaxe qui devrait frapper les activités de la plasturgie, tout en recommandant de venir à bout des dysfonctionnements à l’origine de l’iniquité fiscale et du manque d’efficience en termes de gestion de l’impôt. «Il est inconcevable que le fisc ne dispose que de 300 inspecteurs d’impôts seulement», déplore-t-il. En revanche, il considère que la suppression de la règle du décalage d’un mois, toujours dans le cadre de la réforme de la TVA, est une disposition «louable».
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Modèle économique révolu!

Un constat sans appel. Le modèle économique en vigueur a atteint ses limites. La question qui se pose avec acuité est de trouver l’alternative. L’économiste istiqlalien pense que la promotion des stratégies d’exportation est la bonne voie pour parer aux insuffisances qui entravent le vrai décollage économique. Il propose ainsi d’y allouer 3% du budget d’investissement, soit 2 à 3 MMDH. Mais renforcer toute stratégie d’exportation suppose de construire de véritables capacités d’exportation en mesure d’accélérer l’apport en devises et la préservation des avoirs extérieurs, argumente-t-il, avant de s’interroger sur la vocation réelle des accords de libre-échange (ALE) signés. La quête d’un nouveau modèle économique nécessite, selon bien des économistes, de relancer le processus d’industrialisation que l’Alliance des économistes istiqlaliens a laissé de côté. Interpellé sur cette question, Douiri répond qu’il est déconseillé d’approcher cette aventure de l’industrialisation dans sa globalité. «Il faudrait choisir les secteurs qui sont à la portée de l’économie nationale», prône-t-il.
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Le tourisme balnéaire en panne

La stratégie de développement touristique transite par une zone de turbulence, notamment en ce qui concerne le tourisme balnéaire. Douiri ne cache pas les défaillances caractérisant la gestion de ce grand chantier. «Certes, la réalisation des six stations balnéaires prévues traîne encore. Mais il faut dire aussi que le système de péréquation a été rompu à l’épreuve de la crise mondiale. Il a fallu que l’Etat réagisse par une prise de participation dans le capital des projets en question, à l’image du projet Renault à Tanger», détaille-t-il. Et d’ajouter que l’augmentation du capital dans ce contexte tendu serait d’un apport bénéfique pour la mise en œuvre de ce grand chantier dans la mesure où elle encourage les investisseurs étrangers à s’y mettre.
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L’emploi, ce parent pauvre!

Le projet de loi de Finances pour l’année 2014 prévoit dans sa mouture initiale la création de plus de 18.000 postes budgétaires. Douiri conçoit que l’objectif de contenir les dépenses liées à la masse salariale n’est qu’un trompe-l’œil politique. Sur les 18.000 postes prévus, il faut savoir que 14.000 sont anticipés sur des départs en retraite. Ce qui veut dire que les créations nettes d’emplois ne dépassent guère 4.000 postes, analyse-t-il. À ce titre, il remet en cause la politique de l’emploi en vigueur, laquelle est incapable d’apporter les solutions idoines au problème épineux du chômage. A l’origine de ces freins structurels, le modèle économique et sociétal encore loin de favoriser les créations d’emplois durables.

MM

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