Médias/ Maroc | La difficile reprise des journaux «Print»

Quand la décision de lever l’interdiction d’imprimer les «journaux-papier» est tombée le 23 mai dernier, les 1ères réactions ont été celles d’un soulagement.

Une interdiction administrative frappant la presse n’est jamais une bonne chose en démocratie. L’état d’urgence sanitaire, le confinement et toutes les mesures de prévention contre une propagation non contrôlée du nouveau Coronavirus Covid-19, en avaient atténué le choc. Mais l’interdiction générale de parution de journaux «Print» était bel et bien un fait inédit au Maroc, que les éditeurs ont malgré tout accueilli avec grand sens du devoir, basculant aussitôt sur le digital pour poursuivre leur travail, ô combien nécessaire dans de telles circonstances, pour assurer la bonne information, la vraie, l’utile, la responsable…

La levée de l’interdiction est donc un retour à la normale.

Cependant, après la minute de soulagement, le réalisme a pris le dessus et les difficultés, pour un retour des journaux «Print» sur le marché, se sont alignées devant les éditeurs.

D’abord, les difficultés liées à la distribution.

Le distributeur peut bien recevoir les journaux imprimés, mais pour les distribuer où ? Les points de vente sont tous fermés pour cause d’état d’urgence sanitaire. Ni les kiosques, ni les cafés où les quotidiens comptent un grand nombre de leurs lecteurs, ni les gares, ni les terrassiers, ni l’autorisation de circuler entre les villes…

Certes, un jour plus tard, l’autorisation de rouvrir a été donnée aux kiosques. Mais quels kiosques pouvaient le faire ? Les plus grands sont ceux qui vendent les journaux et magazines du Maroc et de l’étranger. Or, les frontières sont fermées… Donc ni journaux ni magazines étrangers ne les franchissent… Ce qui n’est pas pour encourager ces points de vente.

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Le distributeur aussi s’est retrouvé face à des incertitudes. Pour relancer son activité, il devait avoir des réponses à deux niveaux.

Au niveau des éditeurs. Savoir qui va imprimer son journal, malgré les restrictions pratiques ?

Et au niveau du réseau de distribution. Savoir quels points de vente vont accepter d’ouvrir avant le de-confinement ?

Sauf que, pour prendre une décision, les éditeurs voulaient d’abord savoir sur quels points de vente ils pouvaient compter…

ll fallait attendre que le distributeur leur donne cette réponse.. Pour lui donner la leur…

C’est ainsi que, mercredi 27 mai, le rapport du distributeur est tombé.

On pouvait y lire «comme convenu, nous avons procédé hier à un recensement terrain pour identifier les points de vente ouverts de notre réseau de distribution.

Nous avons pu visiter 94% des points de vente à l’échelle nationale, y compris nos clients région, où nous avons relevé un taux d’ouverture de 45% du réseau.

Les points de vente recensés « ouverts » réalisaient, avant la crise, un pourcentage de 44% des ventes de notre réseau».

Les deux chiffres sont édifiants. Sur la quasi-totalité des points de vente, moins de la moitié ont rouvert. Et ces points de vente aujourd’hui ouverts réalisaient, en temps normal, 44% des ventes…

En temps normal… Car, selon les statistiques du distributeur, dès le 1er jour de l’état d’urgence (jeudi 19 mars), les ventes des quotidiens nationaux ont baissé de -51% par rapport à une journée d’avant la crise (celle du mardi 10 mars, par exemple). Et le lendemain (vendredi 20 mars), même si les journaux sont restés en vente tout le week end et que le taux d’ouverture des points de vente était de 80%, les ventes ont dégringolé à -69% (par rapport à la même journée du mardi 10 mars).

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Qu’en sera-t-il donc, aujourd’hui, dans les conditions actuelles ?

D’autant que la difficulté ne s’arrête pas à la distribution.

Quand bien même les journaux seraient distribués dans un plus grand nombre de points de vente, voire dans tous les points de vente, où est le lecteur qui va les acheter, puisque le confinement  est prolongé jusqu’au 10 juin ?

L’angoisse des éditeurs ne s’arrête pas là.

Même après le 10 juin, combien de personnes iront acheter les journaux, alors que pour en interdire l’impression, l’argument majeur avancé était celui d’une possible transmission du virus par ces journaux ?

Compte tenu de tout cela, nombreux sont les éditeurs qui ont décidé d’attendre d’y voir plus clair avant de relancer l’impression de leurs journaux.

Le fait est que le coût d’impression des journaux pèse lourd dans les charges des éditeurs qui sont étouffés par les crises successives qui s’abattent sur le secteur de la presse. Ils ne peuvent plus se permettre de quelconques dépenses inconsidérées…

Avant la pandémie, pendant la pandémie, les éditeurs n’ont eu de cesse de se battre, de toutes leurs forces, pour la résilience de ce secteur. Ils le feront encore après la pandémie. Mais ce n’est pas leur seule responsabilité. C’est celle de tous. Parce que si la presse crédible disparaissait, ou même seulement faiblissait, ce serait le règne des «virus-infox», «fake news» et anarchie médiatique, dont on a eu un avant-goût des ravages pendant cette crise sanitaire.

Bahia Amrani

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