Loi de Finances 2018 : Les hauts et les bas d’un projet

Loi de Finances 2018 : Les hauts et les bas d’un projet

Le projet de loi de Finances (PLF 2018) bascule entre de grandes ambitions et quelques «flops», dégageant ainsi une tendance assez  mitigée. En effet, le PLF laisse entendre que les secteurs sociaux, les industriels, les investisseurs publics et privés et les PME seront les grands gagnants de la réforme. Mais les ménages et les courtiers d’assurance, par exemple, ne se contenteront même pas du minimum, car ils vont être encore lésés.

Pourtant, selon le ministre de l’Economie et des Finances, Mohamed Boussaid, le PLF 2018 est un projet volontariste à forte vocation sociale. Il accorde la priorité à la création de l’emploi et au soutien et à l’encouragement de l’investissement privé. Ce projet s’articule autour de quatre axes s’érigeant en priorités absolues pour le gouvernement, notamment l’appui des secteurs sociaux, l’enseignement, la santé, l’emploi et la réduction des disparités spatiales, avec un intérêt particulier au monde rural.

Carburant, taxe et dette

Pour le carburant, le PLF prévoit le passage de la TVA à 14%, contre 10% actuellement. Il instaure également une hausse du tarif du timbre fixe relatif au passeport de 300 DH à 500 DH. Les droits d’importation sur certains produits finis et semi-finis, soumis actuellement aux taux de 17,5 et 25%, subiraient le même sort. Ils passeront respectivement à 25 et 30%. Sur ce plan, même si le niveau de la dette du Trésor (dette extérieure et dette intérieure) sur le PIB reste assez élevé, cela ne semble pas inquiéter le Maroc. Pour Boussaid, le taux de 64,7% du PIB est soutenable. «L’objectif est de le réduire autour de 60% à la fin de ce mandat», a-t-il expliqué. «Depuis le début de l’année, nous avons remboursé 92 MMDH», rassure le ministre qui fait savoir que l’Etat a «…plus remboursé qu’emprunté au niveau de la dette extérieure» et que le  rating au niveau de la dette n’a pas changé. «Au niveau de l’investment-grade, nous sommes toujours à BBB- avec perspectives stables ». Il a relevé qu’ «on ne peut pas vouloir une économie moderne sans recourir à l’endettement». Et de souligner que l’Etat remboursera courant 2018 quelque 30 MMDH d’arriérés de TVA, précisant que 10 MMDH de ces arriérés concernent le secteur privé et 20 milliards le secteur public.

Par ailleurs, outre la distribution des enveloppes budgétaires qui témoigne de la volonté de l’Exécutif d’améliorer les services sociaux, comme la santé et l’éducation et de poursuivre ses efforts d’investissement, le pacage fiscal proposé traduit un changement d’approche pour la relance de l’économie.
En Effet, au lieu du soutien à la demande intérieure pratiqué jusque-là, générateur de déséquilibres macro-économiques, le gouvernement semble privilégier désormais le développement de l’offre à travers une série de mesures de soutien à l’entreprise. S’agissant des crédits d’investissements à la disposition de l’administration, ils ne sont plus seulement de 68,3 MMDH, mais de 128 MMDH, une évolution qu’on qualifie plutôt d’orientation «favorable» pour l’économie, vu que  l’investissement demeure l’une des principales variables de la croissance.

HD

Investissement public : Encore des efforts à fournir

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Les investissements projetés des établissements et entreprises publics (EEP) qui dépassent les 107 MMDH, contre 80 MMDH en 2017, montrent que le gouvernement croit à la poursuite incontestable de la dynamique des investissements des EEP et leur maintien à un palier élevé, supérieur à 100 MMDH, pour la première fois depuis 2010. Tout en ayant réussi la prouesse de maintenir l’enveloppe de son investissement dans la conjoncture internationale chahutée de ces dernières années, le Maroc ne semble pas encore en mesure d’en tirer toutes les retombées espérées. L’idée fait l’unanimité parmi les spécialistes et est même aujourd’hui confortée par les constats de l’Exécutif. «Des efforts restent à fournir pour relever les défis qui empêchent d’atteindre le niveau d’efficacité requis pour les investissements publics et de réaliser ainsi des taux de croissance plus élevés et des niveaux d’inclusion plus soutenus», lit-on dans le rapport sur la répartition régionale de l’investissement, que vient de publier le ministère de l’Economie et des Finances, en accompagnement du PLF 2018.

Investissement privé : La nécessaire redynamisation

Le PLF 2018 vise à redynamiser l’investissement privé et accompagner l’entreprise nationale, afin de l’encourager à créer des opportunités d’emploi pour les jeunes et à continuer de soutenir les investissements publics dans la même finalité. A ce sujet, Boussaid a fait savoir: «Pour 2018, toute entreprise privée sera exonérée de l’IR et des charges sociales pour les 10 premiers salariés dans le cadre du programme ‘‘Tahfiz’’». Cela concerne les salariés touchant à partir de 10.000 DH. Cette mesure est destinée à encourager l’emploi qui n’a pas beaucoup progressé ces dernières années. «L’emploi doit être soutenu par le secteur privé et l’investissement privé doit continuer à évoluer». «Il y a un ensemble de dispositifs prévus par le PLF 2018 pour soutenir l’emploi», a noté Boussaid qui a expliqué que l’augmentation des investissements publics dans le cadre de la loi de Finances et l’adoption de mesures destinées à promouvoir l’investissement privé visent surtout à rétablir la confiance des investisseurs et à encourager les entreprises à créer des opportunités d’emploi pour les jeunes. D’autant plus qu’il s’agit d’un projet social visant à apporter des réponses aux attentes des citoyens relatives aux secteurs de la santé, de l’éducation et de l’emploi et que le gouvernement a réservé environ la moitié du budget aux secteurs sociaux.

Régionalisation : La réelle mise en marche

De plus, la réalisation d’un développement économique et social équilibré est étroitement liée à la nécessité d’une mise en œuvre rapide de la régionalisation avancée, a dit Boussaid. Il a ajouté que le gouvernement continuera d’appuyer financièrement les régions dans l’exercice de leurs prérogatives, à travers l’augmentation, de 3 à 4%, de sa part des revenus de l’impôt sur le revenu et de l’impôt sur les sociétés, auxquels s’ajouteront des fonds provenant du budget général de l’Etat. Ce qui signifie que les régions bénéficieront de transferts financiers avoisinant les 7 MMDH. Le gouvernement œuvrera également à adopter et mettre en œuvre rapidement la Charte de déconcentration administrative et à mettre en place un plan de transferts des prérogatives aux régions, sans oublier l’application des dispositions réglementaires prévues par la loi organique relative aux régions, dont le nombre de textes déjà approuvés a atteint 66 sur un total de 69 textes, soit un taux de 95%.

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Compensation : Juste un petit plus …

Pour ce qui est de la compensation, le PLF 2018 prévoit une dotation de 13,019 MMDH. Cette dotation est destinée à soutenir les prix du gaz butane et des produits alimentaires (sucre et farine de blé tendre). Il est à rappeler qu’en 2017, la loi de Finances avait programmé une enveloppe de 12,65 MMDH, au titre de la compensation. Pour la période janvier-juillet 2017, la charge prévisionnelle relative au soutien des prix du gaz butane, du sucre et de la farine de blé tendre s’est élevée à 9,1 MMDH, dont 8,7 MMDH ont déjà été débloqués. La charge de compensation, qui s’est chiffrée à 56,6 MMDH en 2012, a ainsi totalisé au cours de la période 2011-2015 près de 200 MMDH. Ce qui constitue «un important coût d’opportunité par rapport à l’investissement public et au développement de l’infrastructure nationale, ou à l’acquittement d’une partie de la dette du Trésor marocain», estime le ministère des Finances. En connaissance des retombées d’une telle dépense à moyen et long termes, tant sur le plan budgétaire que sur le plan économique, la réforme de la compensation a été érigée parmi les réformes prioritaires qui visent à «redresser les équilibres macro-économiques du pays et favoriser une croissance plus élevée et plus inclusive, où se conjoignent le renforcement des investissements d’une part et la protection de la population vulnérable, d’autre part», souligne encore le ministère. A l’issue d’une décompensation progressive qui a commencé en 2012, les prix des produits pétroliers liquides ont été libéralisés en décembre 2015, ce qui a contribué à la baisse du poids de la charge de compensation de 6,5% du PIB, en 2012, à 1,4% du PIB, en 2016. Les marges dégagées à travers cette réforme ont permis, dans un premier temps, de ramener les dépenses aux seuils autorisés par la loi de Finances, d’apurer les arriérés de la compensation, puis de renforcer les budgets alloués aux secteurs sociaux, dans le cadre d’une transition qui vise à améliorer l’efficience des dépenses publiques et à soutien plus ciblé des populations pauvres et vulnérables, note la même source. En s’inspirant des expériences internationales et en puisant dans l’expérience nationale dans le domaine de la protection sociale, le Maroc a conçu de nombreux programmes sociaux adaptés au contexte marocain durant ces dix dernières années, alimentés à partir du budget général, du Fonds de cohésion sociale, du Fonds d’entraide familiale et du Fonds de l’Initiative nationale pour le développement humain, fait remarquer la même source. Parallèlement à ces programmes, le Royaume a pris certaines dispositions pour préserver l’accès des citoyens au transport public, à savoir le remboursement du surcoût du gasoil induit par la réforme dans le transport urbain par autobus et le soutien au transport scolaire.

Hamid Dades

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