France : Eté pourri et valse du gouvernement

Hollande valls france

Après un été pourri, le président français connaît une rentrée catastrophique. Remaniement en urgence, démission d’un nouveau ministre suspecté de fraude fiscale, sondages désastreux, difficultés internationales, livre calamiteux de son ancienne compagne, rien ne lui aura été épargné.
Il fait face, mais il est touché; c’est un homme blessé. Il est blessé par le désamour des Français; il est blessé par l’image que l’on veut donner de lui. Il sait aussi que c’est grave -cela va bien au-delà de sa personne-, grave pour l’image de la fonction présidentielle, grave pour la gauche.
L’irrespect du président, au-delà bien sûr de la critique politique normale, est un nouveau signe d’une dégradation alarmante de la démocratie française et du contrat républicain. La gauche, elle, est de plus en plus assimilée à une certaine hypocrisie.
On fait campagne contre la finance et puis on se soumet par pragmatisme à ses règles en virant les ministres les plus à gauche. Les Français qui ont voté Hollande n’ont certes pas voté pour ça. Encore une fois, un membre du gouvernement grand donneur de leçon fiscale doit partir, pris la main dans le sac pour le moins d’irrégularités en contradiction avec son discours. Dans un livre assassin fait pour faire mal, le président est présenté dans le privé comme un cynique méprisant les pauvres.
Décidément, c’est la loi des séries.

François Hollande et Manuel Valls pensaient avoir sorti la tête de l’eau après avoir écarté les ministres contestataires. Mais avec le livre de Valérie Trierweiler et l’affaire Thévenoud, l’Exécutif vient de traverser une nouvelle semaine tragique. Après le ministre du Budget Jérôme Cahuzac et son compte bancaire caché en Suisse et le conseiller du président Aquilino Morelle soupçonné de conflit d’intérêt avec un laboratoire, voici un secrétaire d’État adversaire affiché de la fraude fiscale, membre de la commission d’enquête sur l’évasion fiscale de Cahuzac, qui «omet» de déclarer ses revenus pendant plusieurs années. L’éviction de M. Thévenoud est venue s’ajouter à une journée terrible pour le pouvoir, avec de très mauvais sondages pour François Hollande et Manuel Valls et surtout le grand déballage que constitue le livre de l’ex-compagne du Président. Parmi des dizaines d’anecdotes rapportées par la journaliste Valérie Trierweiler, un mot frappe: les «sans-dents», «plaisanterie» goûtée, selon elle, par le Président pour évoquer les pauvres.
Difficilement crédible au-delà d’un mot cynique fait pour choquer dans le cercle privé et qui ne reflète en rien la vraie pensée du président.
Lors de sa conférence de presse qui concluait le sommet de l’OTAN, François Hollande a répliqué aux accusations les plus politiques portées par Valérie Trierweiler dans son livre, insistant sur le fait qu’il est «au service des pauvres». Il a exclu également de démissionner ou de procéder à une dissolution.
Il s’est situé d’abord sur le terrain de la fonction présidentielle qui «doit être respectée». Mais il a surtout voulu procéder à deux mises au point. La première consistait à mettre fin à la polémique sur les «sans-dents» qui remettait en cause la sincérité de son engagement à gauche. Avec gravité et émotion, il a déclaré: «Je n’accepterai jamais que puisse être mis en cause ce qui est l’engagement de toute ma vie, de tout ce qui a fondé ma vie politique, mes engagements, mes responsabilités, mes mandats que j’ai exercés». Une émotion indiscutablement sincère, mais qui ne changera pas la donne politique.
Il sait aussi à qui tout cela profite.
Le sondage IFOP réalisé pour Le Figaro les 3 et 4 septembre est sans appel: si l’élection présidentielle de 2017 avait lieu dimanche prochain, Marine le Pen serait en tête au premier tour. Largement, dans tous les cas de figure et quel que soit son adversaire à droite. Au deuxième tour, c’est une première, la présidente du Front national battrait même François Hollande… Au deuxième tour, si Marine Le Pen devait se retrouver face à l’actuel chef de l’État socialiste, celui-ci serait battu très largement, à 46% contre 54 %. Ce n’est bien sûr qu’un sondage à deux ans et demi du vote.
Mais pour sauver sa présidence, ses chances de réélection ou simplement la survie de la gauche, pour Hollande, le temps est compté. Il doit obtenir des résultats économiques. Ou alors, il peut dissoudre. La droite reviendrait au pouvoir et gouvernerait, se cramant à son tour, laissant le président reprendre de la distance et de la hauteur, se refaire une santé politique, comme ce fut le cas pour Mitterrand et Chirac. Pour certains, le meilleur moyen d’ailleurs d’en finir avec le Front national serait de le laisser participer au pouvoir d’une manière ou d’une autre.
Il s’y refuse… Mais pour certains de ses conseillers, ce serait pour lui la meilleure solution. De toute façon, pour eux, le PS est cramé: il faut donc sauver le président Hollande.
Un président soldat au milieu d’une débâcle.

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Patrice Zehr

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