Le Maroc face aux chiites

Miliciens houthis yemen 2015

En annonçant sa participation, dès le 1er jour, à la coalition arabe conduite par l’Arabie Saoudite qui mène une intervention militaire au Yemen, depuis le 26 mars dernier, contre les chiites houthis, le Maroc a pris une position claire.
Pourquoi le Royaume s’est-il engagé dans cette guerre contre les Chiites ?
A-t-il eu raison de le faire ? Quelles en seront les conséquences ? Ces questions sont sur toutes les lèvres depuis l’annonce de la décision.

Le communiqué du ministère des Affaires étrangères, rendu public à Rabat, le 26 mars 2015, est sans ambiguïté. Il annonce que «Le Royaume du Maroc a décidé d’apporter toutes les formes d’appui et de soutien à la coalition pour le soutien de la légitimité au Yémen dans ses dimensions politique, de renseignement, logistique et militaire».
En effet, les six F16 (avions de combat) du Maroc, déjà sur place aux Emirats Arabes Unis et combattant dans le cadre de la coalition contre Daech, ont été mis à la disposition de la coalition arabe contre les Chiites houhtis.
La coalition a décidé de limiter ses interventions à des raids aériens, dans un premier temps. Il s’agit de stopper l’avancée fulgurante des milices chiites houthis qui, après avoir pris Sanaa, la capitale, se dirigeaient vers Aden, ville importante du Sud ; de détruire la défense aérienne de ces milices, ainsi que leurs dépôts d’armes et les bases sous leur contrôle.

Avec six avions de combat, la participation du Maroc –égale à celle de la Jordanie (six F16 également)- n’est pas négligeable. Le riche Qatar en a mobilisé 10 ; Bahrein et le Koweït 15 chacun ; les Emirats 30 et l’Arabie Saoudite, chef de file de la coalition, 100 avions.
L’Egypte, elle, a placé quatre navires de guerre dans le canal de Suez, pour sécuriser le Golfe d’Aden, au large du Yémen.
Mais c’est ce n’est pas tant le nombre d’avions «mis à disposition», que la participation elle-même, qui compte.
Une participation assumée (certains pays, craignant de possibles réactions, n’ont pas voulu annoncer leur participation à la coalition anti-chiites) ; annoncée officiellement ; et même motivée. Dans deux communiqués, le Maroc explique se tenir «aux côtés du Royaume d’Arabie Saoudite dans ses efforts visant à défendre son territoire et à empêcher toute atteinte de près ou de loin, à la Sainte Mosquée ou menace à la sécurité de la région tout entière» ; et mettre les Forces Royales Air «à la disposition de cette coalition afin de sortir le Yémen de la crise dans laquelle il s’enlise et de la situation sanglante qu’il traverse, et faire face à toute conspiration étrangère ourdie contre ce pays et contre la sécurité du Golfe et arabe».
Quelle est donc cette conspiration étrangère qui menace le Yemen, la sécurité du Golfe et la sécurité arabe ?
Il est clair que toute cette mobilisation arabe ne vise pas de simples milices.
Le problème du Yemen ne date pas de ce mois de mars.
Il remonte à septembre 2014, quand les Houthis se sont opposés au pouvoir du Président Hadi et afflué à Sanaa pour dénoncer un projet de Constitution prévoyant un Etat fédéral dont le découpage allait priver le Nord d’un accès à la mer. Depuis septembre, la crise perdure. Mais, soutenus et armés par l’Iran, les Houthis sont allés crescendo dans leur rébellion, s’emparant de la capitale, du palais présidentiel et marchant sur d’autres villes. Six mois plus tard, l’Arabie Saoudite a pris la mesure du danger, voyant derrière les Houthis, la menace chiite et, plus précisément, la menace iranienne. Car, en réalité, tout se joue à ce niveau-là.
Depuis quelques années, les monarchies du Golfe, sunnites, voient l’influence de l’Iran et de son chiisme s’étendre considérablement. De l’Irak où la chute de Saddam Hussein a permis l’arrivée au pouvoir des Chiites et où, aujourd’hui, l’Iran aide l’armée irakienne à tenir tête à l’Etat islamique… Au Liban avec le Hezbollah de Hassan Nasrallah… En passant par Gaza, la Syrie… Et, aujourd’hui, le Yemen. Sans compter les poussées de fièvre (chiite), ici et là, Bahrein et l’Arabie Saoudite ayant eu à en souffrir récemment.
Pour ces monarchies, il est temps de stopper cette influence rampante de l’Iran, cette extension du croissant chiite !

Pourquoi le Maroc s’est-il engagé dans cette guerre contre les Chiites ?

Et le Maroc, pourquoi partage-t-il ce combat ?
Certains pourraient répondre que le Maroc renvoie tout simplement l’ascenseur aux pays du CCG (Conseil de coopération du Golfe) qui ont récemment décidé de l’associer au CCG et d’investir substantiellement dans l’économie marocaine.
La réponse serait simpliste.
En réalité, outre les liens de coopération et de solidarité qui existent entre le Maroc et les monarchies du Golfe, notamment avec l’Arabie Saoudite et les Emirats, il y a des motivations plus profondes et plus stratégiques.
Le Maroc est d’abord un pays sunnite avec un Roi ayant le titre de «Commandeur des croyants». Toute menace chiite contre les sunnites le concerne.
Dans le Royaume, les Chiites sont très peu nombreux, ils sont tolérés bien que moyennement appréciés, mais un œil est toujours gardé sur eux et sur l’influence qui pourrait s’exercer sur eux. Rabat vient à peine de reprendre ses relations diplomatiques avec l’Iran, lesquelles avaient été rompues, entre autre, pour cause de tentative d’endoctrinement de Marocains (et de soutien aux séparatistes). Le Maroc fait donc de la protection éloignée.
Par ailleurs, la course à l’armement au Maghreb a poussé le Maroc à réfléchir lorsque des propositions ou des opportunités d’alliances se sont présentées à lui. Avant de s’engager dans cette coalition, le Maroc avait déjà concrétisé une alliance militaire avec les Emirats arabes unis. L’alliance avec le CCG est en bonne voie. Et aujourd’hui, le voilà choisissant clairement son camp en participant à l’opération «tempête décisive». Il se retrouve ainsi au cœur d’une coalition de plusieurs pays, qui offre tous les avantages d’un réseau de soutien mutuel… pour l’avenir ! De même qu’il avait fait un choix clair, quelques semaines auparavant, en décidant de faire partie de la coalition anti-Daech.

Yémen : Deux ans de guerre et… la famine!

A-t-il eu raison de le faire ?

Dans le document final publié à l’issue du Sommet arabe de Charm el-Cheikh (Egypte), le 29 mars dernier, les leaders des pays arabes ont sonné l’alarme, estimant qu’ils étaient menacés dans «la structure même de leurs Etats, leur intégrité territoriale et l’unité de leur nation».
A elles seules, ces raisons justifieraient amplement le choix de s’impliquer dans le combat.
Les dirigeants arabes ont également beaucoup insisté sur le retour à la légitimité du pouvoir au Yemen, où le Président Abdrabbou Mansour Hadi a été renversé par le coup d’Etat des Houthis.
On ne peut logiquement pas non plus reprocher au Maroc d’avoir répondu, en même temps que d’autres pays de la Ligue Arabe, à l’appel qui a été lancé par le Président légitime A.M. Hadi, aussi bien à la Ligue qu’à l’ONU, pour l’aider à rétablir la légitimité. «Je vous appelle mes frères à soutenir le peuple yéménite et à protéger le Yémen et ce, sur la base du principe de légitime défense consacré par l’article 51 de la Charte des Nations Unies, ainsi que sur la base de la Charte de la Ligue des Etats arabes et du traité de défense arabe commune», a-t-il écrit dans un message adressé au Sommet de Charm el-Cheikh.
Les réserves de ceux qui craignent un enlisement de cette guerre au Yemen, ou un embrasement de toute la région, s’il y avait confrontation directe avec l’Iran –et non plus seulement avec les Houtis- sont compréhensibles. Il semble cependant que les pays de la coalition arabe n’avaient pas plus le choix que ceux de la coalition anti-Daech (certains pays, dont le Maroc ou les Emirats, sont engagés dans les deux coalitions). Le Maroc est certes loin de la région, géographiquement, mais désormais, la géographie n’est plus un rempart. Elle ne l’est ni pour le terrorisme ou l’obscurantisme, ni pour le chiisme.

Quelles pourraient être les conséquences ?

Avoir peur des conséquences, c’est faire le choix de ne pas agir. Le Maroc n’a pas fait ce choix-là. Son positionnement comporte des avantages et des inconvénients.
Les avantages sont clairs.
Les inconvénients, eux, existent, mais leur gravité sera fonction de l’issue des combats.
Une chose est sûre, avec les menaces de Daech et du chiisme offensif, les Pays arabes ont réalisé combien étaient nécessaires l’action commune et la solidarité.
D’où leur décision de mettre en place une Force militaire commune (voir encadré). Il faut espérer que le projet aboutisse dans les délais impartis et n’aille pas, encore une fois, pâtir du fameux dicton «les Arabes se sont mis d’accord pour ne jamais se mettre d’accord».

BA

Coalition arabe au Yemen : Annonce de la participation du Maroc


C’est le 26 mars 2015, le jour-même de l’entrée en action de la coalition arabe, au Yemen, contre les miliciens chiites Houthis, qu’un communiqué du ministère des Affaires étrangères et de la coopération (MAEC) a annoncé que le Maroc participerait à cette coalition.
Le communiqué indiquait que: «En réponse à la demande de Son Excellence M. Abdrabbou Mansour Hadi, président légitime de la République yéménite et partant du soutien à la légitimité au Yémen et de la solidarité avec ses partisans, ainsi que de l’engagement continu quant à la défense de la sécurité du Royaume d’Arabie saoudite frère et d’Al Haram Acharif, et celle des autres pays du Conseil de coopération du golfe auquel le Royaume du Maroc est lié par un partenariat stratégique multidimensionnel, le Royaume du Maroc a décidé d’apporter toutes les formes d’appui et de soutien à la coalition pour le soutien de la légitimité au Yémen dans ses dimensions politique, de renseignement, logistique et militaire». Soutien qui comprend «la mise des Forces Royales Air stationnées aux Emirats arabes unis frères à la disposition de cette coalition afin de sortir le Yémen de la crise dans laquelle il s’enlise et de la situation sanglante qu’il traverse, et faire face à toute conspiration étrangère ourdie contre ce pays et contre la sécurité du Golfe et arabe».
La veille, le Maroc exprimait sa «totale solidarité» avec l’Arabie Saoudite et son «appui à la légitimité au Yémen». Un tout premier communiqué du MAEC annonçait que le Maroc «se tient aux côtés du Royaume d’Arabie Saoudite dans ses efforts visant à défendre son territoire et à empêcher toute atteinte de près ou de loin, à la Sainte Mosquée ou menace à la sécurité de la région tout entière».
C’est ainsi que le Maroc annonçait le lendemain qu’il participait à la coalition, aux côtés d’autres pays arabes, une dizaine en tout, dont –en plus de l’Arabie Saoudite qui dirige la coalition- les Emirats Arabes Unis, Bahreïn, le Koweït, le Qatar, l’Egypte, la Jordanie, le Soudan et le Pakistan.

Ils soutiennent…


– L’Organisation de la Coopération Islamique (OCI) a exprimé son appui à «la démarche des Etats soutenant la légalité au Yémen» et fait porter aux Houthis «la responsabilité de l’échec de la solution pacifique».
Dans un communiqué, le Secrétaire général de l’OCI, Iyad Ameen Madani, a indiqué que l’OCI appuie «la démarche des Etats soutenant la légalité constitutionnelle dans ce pays (Yémen) et qui ont répondu à la demande que leur a adressée la direction yéménite de sortir le pays du chaos que lui a imposé le groupe des Houthis et de ses répercussions sur la région dans son ensemble et de traiter cette situation de façon à préserver la légalité et les institutions constitutionnelles du pays».

– Le Parlement arabe, par la voix de son président, Ahmed Al-Jarouane, a indiqué que «Le parlement arabe se tient aux côtés des directions yéménite et arabe qui se sont mobilisées pour défendre la sécurité et la stabilité du Yémen, préserver la légitimité et empêcher les houthis de piétiner la volonté du peuple yéménite frère, après des tentatives vaines de dégripper la crise à travers des négociations pacifiques, sur la base de l’initiative du Golfe et des conclusions du dialogue national». «Le groupe houthi a dépassé toutes les limites et n’a pas obtempéré à la volonté des Yéménites, ni aux conclusions de la légitimité internationale, persistant ainsi dans son agression contre le peuple yéménite frère, avec à l’appui un soutien régional, ce qui a rendu nécessaire une mobilisation rapide pour conter, avec fermeté, l’offensive houthie, soutenir le peuple yéménite et préserver sa sécurité, qui est celle de toute la Oumma arabe», a-t-il ajouté.

– Les Etats-Unis, également, ont fait part de leur soutien à l’opération. Le président Barack Obama a autorisé un soutien en matière de logistique et de renseignement, a précisé un communiqué de la Maison blanche.
Et, à Lausanne, où il est arrivé pour des négociations sur le programme nucléaire iranien, le chef de la diplomatie américaine, John Kerry, a salué l’offensive et a confirmé que Washington apportait un soutien à cette opération.

– Le ministère britannique des Affaires étrangères a approuvé l’initiative saoudienne «qui fait suite à une demande du président Hadi pour défendre par tous les moyens le Yémen et repousser l’agression houthie».

– La Turquie, pays non-arabe, «soutient l’opération militaire lancée contre les combattants Houthis au Yémen», a annoncé le 26 mars un communiqué du ministère turc des Affaires étrangères.

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Un commentaire

  1. J’ai vu les images des massacres au Yemen!!! Ca ressemble en tout point aux massacres de gaza, sauf qu’au Yemen ce sont des arabes sunnites qui massacrent!!!!

    Le Yemen est le pays arabe le plus pauvre, et les saouds ne sont pas les représentants de l’islam. Ce sont des traitres alliés d’israel

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