Le crédo de «Monsieur UMA»

Habib benyahya sg uma

Les ministres des Affaires étrangères de l’UMA se sont réunis à Rabat. Le volet sécuritaire a été longuement débattu. Habib Benyahya, Secrétaire général de l’UMA (Union du Maghreb arabe) dresse le bilan de cette rencontre qui intervenait dans un contexte de véritable crise.
Crise accentuée par le phénomène du terrorisme qui représente une grave menace pour la sécurité de la région.

Entretien

Les réunions des ministres des Affaires étrangères de l’Union du Maghreb Arabe (UMA) sont périodiques. Pourquoi cette réunion à Rabat?

Pour faire le point de la situation et du processus d’intégration maghrébine et se consulter sur ce qui se passe dans la région, mais aussi dans notre voisinage.

Justement, en évoquant le voisinage, une réunion des 5+5 est dans l’air…

En effet, nous préparons actuellement une réunion 5+5 avec les riverains du bassin méditerranéen.

Et avec les pays africains de la CEDEAO?

Nous préparons également une réunion avec nos frères africains de la CEDEAO. Ils sont quinze et nous sommes cinq. Le Sahara est entre nous.

Quels défis communs?

Il y a le grand problème de la désertification qui tend à s’aggraver. Nous avons établi des statistiques avec la FAO pour constater que 80% des terres maghrébines sont en voie de désertification et que le fléau s’accentue et devient toujours plus grave.

Quelle action commune pour lutter contre cette désertification?

Nous avons des programmes dans chaque pays maghrébin pour lutter contre ce fléau. Nous avons créé une commission qui se penche sur l’avenir des oasis et des points verts dans le désert qu’il va falloir protéger jalousement, parce qu’il y a de l’eau, de l’agriculture et des gens qui y vivent et voient un petit peu l’ensablement, celui-ci étant à l’origine de la migration clandestine.

Dans quelle direction précisément?

Vers l’Europe, mais aussi vers les pays du Maghreb. C’est donc là notre premier défi stratégique, au-delà d’autres, bien entendu.

Est-ce qu’il y a une prise de conscience quant à la dangerosité de ce fléau et à d’autres problèmes plus politiques qui menacent la région et empêchent son intégration?

Il faut reconnaître que les cinq pays maghrébins ont véritablement pris conscience, depuis 1999, de l’importance de ce défi classé prioritaire du fait qu’il touche notre agriculture, les points d’eau, l’environnement et aussi notre production agricole.

Y a-t-il une coordination dans ce sens?

Absolument. Nous avons créé l’Union Maghrébine des agriculteurs qui travaille justement pour faire augmenter la production agricole. Parce que nous importons, cela coûte en moyenne aux cinq pays du Maghreb entre 25 et 40 milliards. Il va falloir accorder une plus grande importance au secteur de l’agriculture. Donc, ce grand défi, qui est somme toute naturel, devrait consolider la coopération entre les pays de l’UMA.

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C’est un défi certes naturel, mais il y en a d’autres, sécuritaires cette fois, qui menacent les pays de la région.

Les défis sécuritaires sont là, en Libye, au Mali où les armes et la drogue circulent à loisir et ils sont en train d’augmenter.

Que font les pays de la région pour les relever?

Peut-être qu’en augmentant, ces défis augmentent notre réflexion commune, parce qu’il s’agit là de 3 défis transfrontaliers. Il faut donc de la maturité et de la réflexion pour les relever.

Ne croyez-vous pas que les systèmes d’éducation et le chômage des jeunes sont pour quelque chose dans la montée de l’extrémisme et du terrorisme?

Je crois que la formation et l’éducation devront préparer nos jeunes en fonction des nouvelles donnes du marché du travail, celui-ci ayant beaucoup évolué depuis les indépendances respectives des pays du Maghreb. Il va donc falloir revoir les nouvelles caractéristiques du marché de l’emploi par rapport à la formation.

Certes, il y a des réunions et des commissions, mais quels résultats et quelle vision d’avenir? Nous avons l’impression que l’UMA patauge et tient des réunions de salon, ni plus, ni moins.

Nous débattons (des problèmes posés) pour voir la réalité dans chaque pays membre de l’UMA et sortir non avec des convictions, mais avec des programmes d’action dans des secteurs clés…

Concrètement alors?

Concrètement, ce grand défi que posent les jeunes est que, lorsqu’ils sortent des universités, ils sont confrontés au vide, au chaos, alors que nous avons des possibilités extraordinaires.

Le fléau du terrorisme s’est invité à la rencontre des chefs de la diplomatie maghrébine à Rabat. Concrètement, qu’est-ce qui a été décidé?

La décision du Conseil des ministres des Affaires étrangères, depuis 2012, a rendu les réunions des ministres de l’Intérieur périodiques, à savoir tous les ans. Ces réunions ont commencé en 2013 ici à Rabat. La seconde réunion a eu lieu à Nouakchott. On y a discuté des défis et créé les commissions sectorielles pour voir et approfondir ces consultations ultra-maghrébines.

Essentiellement pour la forme…

Non, non, pas du tout! Croyez-moi, pas pour la forme. Au contraire, ce sont quatre commissions d’experts en terrorisme qui ont discuté de la coopération frontalière, sécuritaire au vu de l’arrivée de quantités énormes d’armes soldées. Regardez ces kalachnikovs qui se vendent aujourd’hui facilement et à très bon marché, en plus de la drogue qui circule! Donc, tous ces défis compliquent davantage notre tâche. Ils ont rendu le dialogue plus que nécessaire entre les Cinq pour valoriser l’expérience la plus réussie et la mettre en œuvre. Et ce n’est pas pour des considérations individuelles, croyez-moi!

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Vous n’êtes pas sans savoir que lorsqu’on veut noyer un dossier, on l’envoie en commission…

Les commissions sectorielles sont très positives et ce sont les résultats qui comptent.

Ne pensez-vous pas qu’il faudrait plutôt mettre fin aux problématiques politiques qui rendent impossible l’intégration maghrébine? En particulier le conflit algéro-marocain? Avez-vous senti, lors de cette réunion de Rabat, une volonté de faire quelque chose dans ce sens?

L’aspect politique est discuté en même temps que l’aspect économique. Et chaque fois que nous sommes à l’Assemblée générale des Nations Unies, les Maghrébins se rencontrent autour d’un déjeuner ou d’un dîner…

Des commodités, pas plus…

Ce ne sont pas des commodités, ni du bavardage. Les problèmes sont posés et discutés sérieusement.

Et pourtant, les chefs d’Etat du Maghreb n’arrivent pas à tenir un sommet…

Effectivement, ça fait longtemps que les chefs d’Etat de l’UMA ne se sont pas réunis. J’espère que plus les défis, transfrontaliers particulièrement, augmentent, plus les chances d’aboutir positivement se multiplient et unissent nos efforts pour le bien des peuples de la région et pour un réveil commun des pays du Maghreb. Le processus n’est pas un jeu de déclarations et de vœux pieux.

Vous semblez optimiste et pourtant, nous ne sommes pas au bout du tunnel et il n’y a rien de concret.

Je suis optimiste et j’estime que plus les défis augmentent, plus nous sommes forcés de réfléchir et de discuter ensemble.

Vous partagez alors l’adage formulé par feu SM Hassan II: «Kabbarha tassghar».

(Rires) Absolument et j’y crois fortement. Allah irahmou.

Côté financier, l’UMA arrive-t-elle à rentrer dans ses frais? Est-ce que tous les pays membres honorent leur cotisation?

Ce sont des années difficiles pour tout le monde. Le Maroc surtout paye sa participation, le loyer des bureaux et participe aussi au budget.

Certains craignent que l’UMA ne se transforme en Ligue arabe dans sa lenteur et son inefficacité?

Il y a une démarche à laquelle nous réfléchissons pour voir si nous pouvons accélérer le processus. Ecoutez, l’Union européenne a 60 ans. Nous sommes encore jeunes: nous avons 26 ans, depuis la création de l’UMA.

Est-ce qu’une réunion au sommet est dans l’air, vu les grands défis qui se posent et rendent urgent un sommet maghrébin?

Je ne peux me prononcer. Un sommet, c’est l’affaire des chefs d’Etat, mais je pense que la réflexion est lancée.

Interview réalisée par Mohammed Nafaa

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