Paul Lafargue contre la légalisation du cannabis

Paul Lafargue

Entretien avec le Pr Paul Lafargue, fondateur de la Société Française de Toxicologie Analytique

Dans son intervention au séminaire organisé conjointement, le 6 mai à Rabat, par le ministère de l’Equipement, du Transport et de la Logistique et le Comité national de prévention des accidents de la circulation, le Professeur Paul Lafargue, pharmacien en chef des services hors classe (général de division) et président fondateur de la Société Française de Toxicologie Analytique, a abordé le thème d’actualité «Sécurité routière et substances psychotropes: cannabis, approche analytique». Il est contre la légalisation du Cannabis.

Quels sont les objectifs et les grands défis de ce séminaire tenu, ce 6 mai 2014 à Rabat, sur «les dangers liés à la consommation des stupéfiants et à l’alcool au volant»?

L’objectif est à mon sens de donner aux responsables politiques, qui sont les seuls à même de pouvoir prendre les décisions, tous les arguments qui leur permettent de mettre en œuvre une politique adéquate.

C’est-à-dire, plus concrètement?

C’est-à-dire que nous sommes des «techniciens», au sens étymologique du terme- et nous disons donc voilà ce qu’il est possible de faire si on veut le faire.

Est-ce que vous vous contentez de dresser l’état des lieux et de conseiller?

Nous n’avons pas vocation de dire: il faut faire… Mais, comme vous le dites, nous dressons un état des lieux et c’est aux politiques de prendre les mesures qui s’imposent et de décider de la mise en œuvre ou non d’une politique, en l’occurrence, de lutte contre la consommation de stupéfiants, en particulier lors de la conduite automobile.

Et pour ce qui est des statistiques concernant les accidents liés à la conduite en état d’ébriété et à la consommation d’alcool ou de stupéfiants?

On sait qu’il y en a pratiquement entre 25 et 30%, du moins en France. Je parle de ce que je connais bien. Ces accidents sont liés à la consommation de stupéfiants, d’alcool ou de cannabis.

Quand peut-on parler de «grande proportion» en matière d’accidents de la route?

Quand on est face, dans l’ensemble, à une accidentologie due aux substances psychotropes, c’est-à-dire à des médicaments, en particulier les barbituriques, etc. Là, la proportion est encore plus grande: on arrive pratiquement à un accident sur deux.

Et la réaction des pouvoirs publics face à cette situation?

Ça ne peut pas laisser indifférents les pouvoirs publics dans la mesure où, économiquement, ça coûte extrêmement cher aux collectivités, sans compter tous les dégâts collatéraux.

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Est-ce qu’il y a une stratégie bien définie?

De toute façon, la stratégie est simple. Il y a, d’une part, l’approche analytique et technique et, d’autre part, l’approche politique. C’est parfaitement défini: on connaît les normes et les protocoles opératoires. Là, il n’y a vraiment aucun problème. Ce n’est que le fruit d’une décision politique.

Il y a dans cette situation le choix entre prévention et répression. Que choisissez-vous personnellement?

Il faut faire les deux. La prévention, il faut la faire, car elle est plus que souhaitée. Elle est exigée. Mais pensez au tabac. A titre d’exemple, c’est marqué sur le paquet en grosses lettres: «Le Tabac tue», mais s’il n’y a pas de sanction derrière. Il n’y a aucun effet. Je crois qu’il faut faire de la prévention, sensibiliser les gens aux dangers de la consommation des substances psychotropes, dont évidemment le cannabis et, en plus, il faut que les gens sachent qu’il y a une épée de Damoclès sur leur tête qui est la sanction, si jamais ils sont contrôlés positifs.
La prévention, ça se fait y compris au niveau de l’école. Il faut sensibiliser les gens très jeunes, parce que l’on s’aperçoit qu’ils consomment de plus en plus, d’où la nécessité, en plus, du devoir de les sensibiliser très jeunes même.

A quel stade?

Je dirais bien avant le collège. Petit à petit, il faut entrer dans des détails de plus en plus importants. On ne peut pas montrer des photos ou des reportages d’accidents, ça pourrait traumatiser les jeunes. Mais il faut leur signifier que les accidents sont liés en grande partie à la consommation de produits qui ont altéré la vigilance des conducteurs.

Vous parliez du grand public ?

Il y a bien sûr le grand public, les responsables syndicaux et les chefs d’entreprise parce que, comme vous le savez, le chef d’entreprise est responsable à la fois pénalement et civilement. Cela va du domicile du salarié à l’entreprise et vice-versa.

Quelles recommandations pour éradiquer cette problématique ou au moins en limiter les dégâts?

Il faut que le citoyen sache bien qu’il y a une loi qui est répressive. C’est ce qui fait peur aux gens et que, à ce titre, s’il se fait épingler en flagrant délit de conduire sous l’effet de stupéfiants ou d’alcool, il sera sévèrement sanctionné pénalement. Il devra mettre la main à la poche (amende). Il y a aussi la prison, s’il y a récidive.

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Qu’en est-il de la coopération France-Maroc dans ce domaine?

Ecoutez, nous sommes venus pour dire: voilà ce que nous pouvons vous aider à faire et à vous de prendre les décisions qui s’imposent.

Et pour ce qui est de la formation?

Nous sommes aussi prêts à coopérer étroitement dans ce volet. Je suis personnellement conseiller et directeur scientifique dans le laboratoire d’expertise. Nous avons tout le matériel nécessaire et nous sommes prêts à accueillir trois ou quatre personnes.

Quelle est donc la lacune?

Je dirais que le drame, c’est qu’on légalise…
Qu’on ne légalise pas, mais qu’on pénalise la consommation de ces produits !
Les jeunes se laissent prendre au piège et, malheureusement, ça se termine mal sur la route ou au travail aussi. Il y a nombre d’accidents de travail liés à la consommation de substances psychotropes. C’est une problématique très grave.

On parle d’une éventuelle légalisation du cannabis. Qu’en pensez-vous personnellement?

Je suis contre, parce que, si on légalise, on dit que, finalement, ce n’est pas très grave puisque c’est légalisé. Alors, comment expliquez-vous donc que c’est légalisé mais que c’est aussi interdit. C’est l’un ou l’autre: il faut être cohérent dans sa politique.

Interview réalisée par Mohammed Nafaa
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Pr Paul Lafargue


Professeur agrégé du Val-de-Grâce et fondateur de la Société Française de Toxicologie Analytique, il a été sous trois premiers ministre expert national. Il a représenté la France au sein de la Commission européenne et est membre de l’Académie nationale de Pharmacie.

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On ne fume pas avec Louardi !

La loi 91.15, qui interdit de fumer dans les lieux publics, n’a jamais pris effet. Elle a fait l’objet d’un débat lors d’une question orale à la Chambre des conseillers. Une occasion pour le ministre de la Santé, Lahoucine Louardi, d’annoncer la promulgation prochaine d’un nouveau projet de loi qui sera présenté par le Groupe socialiste à la deuxième Chambre. «L’ancien projet de loi, a dit le ministre (PPS), est à mon sens, aujourd’hui, complètement dépassé et je mettrai tout en œuvre pour soutenir le nouveau-né durant toutes les étapes, jusqu’à son adoption et sa mise en œuvre».
«Louardi est sérieux et les fumeurs n’ont qu’à se tenir à carreau. Il l’a prouvé avec la baisse des prix des médicaments», a réagi un conseiller.

 

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Un commentaire

  1. Il est donc pour les sociétés pétrochimiques, les lobbys pharmaceutiques, du coton et la déforestation! Pauvre vieux con! Heureusement qu’il y en a de moins en moins des comme lui! 😮

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