Cette double trahison que mon fils m’impose…

Aziza, 57 ans, assistante de direction, est divorcée et a trois enfants. Cette mère souffre de la déloyauté de son fils. Voici ce qu’elle confie…

«La situation dans laquelle je me trouve va m’achever, c’est sûr. Parce qu’aujourd’hui, c’est au tour de mon propre enfant de me servir de la traîtrise, en guise de merci pour tous les efforts et les sacrifices que j’ai consentis pour qu’il devienne un homme. Il m’inflige de me résigner sur le fait que son bonheur passe avant tout. Qu’il ne prenne pas conscience de la monstruosité de ses agissements sur mon cœur est inconcevable !

Mon inattendue séparation du père de mes enfants m’avait fait tomber plus bas que terre. Mon cher ex-mari m’avait dépouillée de mon héritage par ruse, tout en m’infligeant le pire qui soit. Il s’était travesti en petit promoteur immobilier pour m’obliger à investir dans son projet de construction. Il avait en effet deux parcelles de terrain, dans un lotissement économique. Les construire en immeubles, il en rêvait. Pour mieux m’appâter, il promettait de tout me restituer dès les premières ventes sur plan, avec en sus, plus tard, le partage des bénéfices.

Je lui avais donc tout avancé, les yeux fermés. Je ne pouvais tout de même pas me méfier du père de mes trois enfants. Une stupide éventualité qu’il fallait, malheureusement, vivre pour en souffrir la possibilité. Il m’avait alors non seulement plumée mais, en plus, supprimée, mes enfants et moi, de son existence. J’avais été répudiée et remplacée dare-dare par une jeune fille qui travaillait dans une entreprise de matériel pour bâtiment. Elle est son épouse attitrée, actuellement. C’est elle et ses enfants, les demi-frères des miens, qui jouissent de ce qui devait nous revenir de plein droit. Même si j’avais vu mon existence s’écrouler, mon orgueil m’avait défendu de réagir. J’étais terrorisée à l’idée que de tels échos s’ébruitent. Telle avait été mon embarcation vers l’enfer. J’allais en baver jusqu’à presque en crever.

L’inimaginable continua quand nous avons été jetés dehors, dépossédés de nos affaires les plus intimes, mes enfants et moi, par les frères de mon mari. Notre habitat appartenait à leurs parents. Avec mon divorce, tous les héritiers étaient impatients de récupérer leur bien, avec tout ce qui s’y trouvait à l’intérieur. Inutile d’épiloguer sur mon état du moment et sur celui des enfants. Au fond, avec du recul, même si ces faits paraissaient abjects, ils nous avaient permis d’éviter des scandales successifs qui se seraient certainement soldés par quelque drame irréversible.

Que faire? Où aller? Je ne connaissais personne sur qui je pouvais compter ou ayant une quelconque capacité de nous porter secours. De toute manière, il me fallait obligatoirement avancer sans regarder derrière. Ce même jour, pendant que je tentais de vendre les seules breloques en or que je portais, le hasard avait mis sur mon chemin une vieille amie de classe que j’avais perdue de vue depuis une éternité. Je n’avais pu m’empêcher de pleurer sur son épaule, parce qu’elle ne faisait pas partie de mon milieu. Je n’avais pas pu non plus garder mon lourd secret. C’est cette généreuse personne, un véritable ange, qui ne m’abandonna pas dans mon infortune du moment, ni jamais. Elle m’aida à quitter la ville pour m’installer dans le nord du Royaume, dans un petit logement appartenant à sa sœur vivant à l’étranger.

Mieux encore, grâce à ses interventions, nous avons été pris en charge totalement par quelques membres aisés de sa famille. Ensuite, plus forte psychologiquement, j’ai pu renouer mes liens avec mes proches. Tous étaient tombés des nues par mes aveux. Je me suis également débrouillée pour récupérer les copies de mes diplômes. Avec l’appui de mes nouvelles connaissances, j’ai pu être embauchée dans une grande boîte avec un bon salaire à la clé. C’est de cette façon que je recouvrais ma dignité.

Je n’ai plus jamais voulu entendre parler de mon ex-mari. Pas même lorsque j’avais eu besoin de papiers administratifs pour inscrire les enfants à l’école ou pour leurs cartes d’identité. J’avais tout obtenu, par d’autres voies bien plus fiables. Durant toutes ces années écoulées, nous nous sommes occupés de nous en sortir. Lui était, pour nous, mort et enterré, il ne s’était par ailleurs jamais manifesté. Mes enfants ont beaucoup grandi depuis. L’avenir devrait s’annoncer beau et prometteur pour nous quatre. Mais en ce moment, je n’en ai pas vraiment l’impression.

La cause, c’est mon fils qui risque de me porter le coup fatal avec son histoire de mariage. Je ne suis absolument pas contre le mariage, bien au contraire! Le problème est que je ne sais pas comment il s’est arrangé pour tomber amoureux de la mauvaise personne. Et dire que mon enfant m’impose une alliance avec la cousine directe de sa belle-mère. Je ne peux ni admettre, ni permettre que cette bonne femme, en l’occurrence la cause de notre drame, s’en prenne à l’homme le plus précieux de ma vie! Lorsque mon fils tente de m’expliquer que rien n’a jamais été prémédité et que je devrais plutôt oublier le passé pour son bonheur, je me braque, je ne l’écoute pas! Je comprends seulement qu’il est sacrément culotté d’essayer de me faire accepter l’inacceptable. Est-il fou d’espérer ma bénédiction, pour me retrouver inévitablement face aux deux voleurs qui sont nos ennemis jurés, pour fêter avec eux leur nouveau forfait?

Pour me punir de mon obstination à refuser irrévocablement cette union, mon ingrat d’enfant parle maintenant d’aller solliciter son père pour qu’il l’accompagne et faire sa demande en mariage !!

A cette heure, il me semble que la terre s’est arrêtée de tourner et qu’il n’y a pas pire souffrance que la mienne».

Mariem Bennani

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