Mondial 2026 : Le Maroc, l’Arabie Saoudite, l’Algérie et les autres…

Oui, bien sûr, l’organisation du Mondial 2026 a été attribuée au trio USA-Canada-Mexique avec un score allant du simple au double (65 voix pour le Maroc contre 134 pour le trio) et le dossier est définitivement clos. Le monde du foot est passé à autre chose… En l’occurrence, aux compétitions du Mondial 2018 qui déferlent depuis le 14 juin, charriant leur lot de surprises, joies inattendues et cruelles déceptions…

Pour autant, le choc porté par l’Arabie Saoudite et les pays qu’elle a mobilisés contre la candidature du Maroc n’est ni oublié ni moins douloureux.

Entendons-nous bien. Ce n’est pas la non-attribution de l’organisation du Mondial 2026 au Maroc, en elle-même, qui nous choque le plus, nous autres Marocains.

D’abord, il y avait ceux –très nombreux- qui étaient pour cette candidature, voyant dans le projet une excellente opportunité pour tout booster dans le pays, dans un délai précis: infrastructures, chantiers socio-économiques, emplois… Et ceux –minoritaires, mais non négligeables- qui étaient contre, estimant que le Maroc doit s’atteler à de vraies priorités, l’organisation d’un Mondial du foot n’en étant pas une.

Les premiers pourraient se consoler avec cet engagement du Maroc à réaliser les projets que prévoyait le fameux Bid book (cahier des charges accompagnant la candidature marocaine eu Mondial 2026) ; et se remettre à espérer avec l’annonce officielle de cette nouvelle candidature du Maroc pour le Mondial 2030.

Quant aux seconds, ne pas obtenir une victoire qu’on ne souhaitait pas, ne peut logiquement pas constituer de choc pour eux.

Enfin, à part quelques (très) optimistes, les Marocains, en général, ne se faisaient plus d’illusions, au vu des menaces du Président Trump contre ceux qui ne voteraient pas pour les USA, de l’évident alignement du Président de la FIFA, Gianni Infantino, sur la candidature américaine et de toutes les «petites surprises» de la nouvelle règlementation de la FIFA…

Ce n’est donc pas la défaite qui a constitué le plus grand choc, mais le lâchage des «pays frères».

Devant les menaces de Trump, on croyait l’Afrique plus vulnérable. Or, dans le continent, seuls 10 pays ont voté contre la candidature marocaine (dont certains étaient d’office opposés au Maroc du fait de leur position dans le conflit du Sahara), alors que 43 ont voté en sa faveur… Et ce sont les pays arabes qui ont porté le véritable coup de poignard… Le soutien apporté par le 29ème Sommet de la Ligue arabe (15 avril 2018) à la candidature marocaine, n’était qu’un leurre. L’Arabie Saoudite, grand artisan de la forfaiture, a pu convaincre nombre d’autres «pays frères». Parfois, la solidarité des monarchies du Golfe a joué. Et parfois, les arguments «sonnants et trébuchants» n’ont laissé d’autre choix que d’obtempérer. Comme on comprend une Jordanie secouée par une insurrection populaire que sauvent les 2,5 milliards de dollars promis par l’Arabie Saoudite, les Emirats et le Koweit !

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Le Maroc, lui, foulés aux pieds, ses espoirs ! Oublié son soutien permanent à ces monarchies dans leur guerre contre le chiisme ! Piétinée sa solidarité morale et matérielle dans la guerre du Yemen ! Pour l’Arabie Saoudite et ces monarchies, Trump est un allié bien plus important que le Maroc. Avec l’allié maghrébin, deux arguments suffisent: au mieux une aide matérielle (versée du reste au compte-gouttes) ; au pire, la menace d’aider le Polisario (menace immédiatement brandie, à chaque désaccord. Aujourd’hui, parce que les Marocains osent protester ; hier, parce que le Maroc a choisi la neutralité dans le différend saoudien avec le Qatar). Quant à Trump, c’est l’allié dont ces monarchies attendent tout. D’où, les chèques aux sommes mirobolantes pour l’achat d’armes qui ne les protègeront jamais totalement, mais serviront à attaquer d’autres pays musulmans. D’où aussi leur positionnement, docile voire complice, face aux initiatives de l’administration Trump en Palestine, toutes à l’avantage d’Israël… Et cela, même si ces monarchies savent qu’il n’y a rien de commun entre elles et les Etats Unis, si ce n’est une convergence d’intérêts face à un ennemi commun: l’Iran. Sauf que Trump n’est pas l’allié de l’Arabie Saoudite et des monarchies du Golfe pour les aider à se défendre contre l’Iran, mais pour qu’elles l’aident, lui, à neutraliser la menace que constitue l’Iran pour Israël ! C’est sur l’autel de ce marché de dupes que l’Arabie saoudite a sacrifié le Maroc et obligé d’autres pays à en faire autant.

Il reste à en tirer les leçons qui s’imposent. Les citoyens marocains, qui ne sont pas tenus par le politiquement correct, laissent exploser leur colère, laquelle redouble d’intensité face aux basses insultes des Saoudiens et à leur arrogance (aussitôt exprimée par d’immédiates et brutales expulsions)… Quant au Maroc officiel (diplomatie, gouvernement…), il saura que le pays ne doit compter que sur lui-même. Comme disait un chef d’Etat africain (aujourd’hui, décédé), l’aide des autres doit nous aider à nous passer de leur aide…

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Les 65 pays qui ont voté pour le Maroc, bravant les menaces d’un Président Trump ayant violé une règle élémentaire de la FIFA (la non-intrusion du politique dans le foot), ont droit à la reconnaissance des Marocains. Le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, les a remerciés, un à un, au nom de nous tous. Y compris l’Algérie à laquelle nous oppose une guerre qui ne dit pas son nom, depuis plus de 40 ans et qui a voté pour nous. Les plus rancuniers ont vu dans ce vote une simple défense des intérêts algériens, dont notamment la proximité –et donc l’accessibilité des matches (sans les problèmes de longue distance, visa et grosses dépenses aux Etats Unis)- si le Maroc l’avait emporté. Dans les milieux politico-médiatiques, le raisonnement qui domine consiste à déplorer que l’Algérie s’entête à attaquer le Maroc sur son intégrité territoriale et à vouer l’Union maghrébine à ce sort si préjudiciable aux uns et aux autres. Si le pouvoir d’Alger mettait un terme à ce conflit du Sahara (car c’est de notoriété publique que c’est bien lui qui l’entretient), le Maghreb serait uni. Il deviendrait une voix avec laquelle on compte. Il constituerait une force qui lui permettrait de faire des choix servant d’abord ses propres intérêts. C’est, en d’autres termes, ce qu’exprime régulièrement le Roi Mohammed VI, dans ses discours, lorsqu’il  déplore le non-Maghreb et ce qu’il avait déploré y compris devant le CCG (Conseil du Golfe) en avril 2016. Merci l’Algérie, oui. Mais à qui la faute si le Maroc, qui subit le chantage de tous avec l’affaire du Sahara, est obligé d’aller chercher si loin ses alliances, quand le Maroc et l’Algérie auraient pu faire pour le Maghreb ce qu’ont fait la France et l’Allemagne pour l’Europe ?

Bahia Amrani

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